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LÉLIA.

§. i.


Lélia n’est pas le récit ingénieux d’une aventure ou le développement dramatique d’une passion. C’est la pensée du siècle sur lui-même, c’est la plainte d’une société à l’agonie, qui, après avoir nié Dieu et la vérité, après avoir déserté les églises et les écoles, se prend au cœur et lui dit que ses rêves sont des folies.

Et pour que ce cri douloureux témoignât par lui-même de sa franchise, c’est la bouche d’une femme qui l’a proféré.

Ce n’est donc pas un roman ou un poème ordinaire, et l’on ne doit y chercher ni les épisodes qui excitent la curiosité oisive, ni les traits de réalité extérieure que chacun retrouve dans sa vie personnelle.

Non, tous les caractères de Lélia sont des symboles philosophiques, et représentent, sous une forme idéale et complète, un sentiment particulier, développé isolément, à l’exclusion des sentimens qui pourraient le contrarier, le rétrécir, en diminuer l’éclat et la portée.

Lélia signifie l’incrédulité du cœur, née de l’amour trompé. Elle n’a aimé qu’une fois dans sa vie ; mais elle s’est livrée à cette pre-