Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.
165
DE LA MUSIQUE EN ANGLETERRE.

large ; mais il est froid et peu propre à la profession de chanteur dramatique.

Si tous les acteurs que je viens de nommer étaient réunis à un seul théâtre, on pourrait en former un ensemble assez satisfaisant qu’il serait facile d’améliorer en peu d’années ; mais il n’en est pas ainsi. Covent-Garden et Drury-Lane se les disputent, et le partage qu’ils en font laisse un tel vide dans les cadres, qu’il est impossible d’entendre un opéra passablement exécuté à l’un ou à l’autre de ces théâtres. D’ailleurs, leur clôture forcée, au mois de juin, désorganise chaque année les acteurs, les chœurs et l’orchestre qui ne sont engagés que pour la saison dont la durée est de six ou sept mois. Les artistes de tout genre se trouvent, par suite de cet arrangement, libres de passer d’un théâtre à un autre, mais toujours incertains du sort qui leur est réservé, et privés de ressources pendant une partie de l’année. Il est vrai que, dans cet intervalle, un autre opéra anglais, sans mélange d’aucun autre genre, est ouvert dans un petit théâtre, et que le directeur de ce spectacle puise ses moyens d’exécution à Drury-Lane et à Covent-Garden. Ce moment serait le plus favorable pour composer une bonne troupe et pour obtenir une bonne exécution ; mais the english opera house n’est ouvert que dans un temps où Londres est désert, le directeur est forcé de diminuer ses frais autant qu’il peut, et conséquemment de n’engager que des artistes d’un ordre inférieur.

Il est facile de voir, d’après ce qui vient d’être dit, que des causes étrangères aux dispositions des Anglais pour la musique exercent une influence sur le mauvais état de cet art dans les théâtres lyriques, et que l’absence d’institutions stables est, comme je l’ai dit plusieurs fois, l’origine de tous les défauts qu’on y remarque. Tant que l’existence des théâtres n’aura point de bases plus solides, tous les efforts qu’on fera pour les améliorer seront infructueux, et, par suite, le goût de la nation ne pourra se perfectionner. En de certains pays, l’autorité qui veut régir les théâtres, sans en comprendre le mécanisme, compromet leur prospérité. En Angleterre, l’indifférence absolue du gouvernement produit des effets analogues.

Dans l’examen des causes qui s’opposent aux progrès du goût musical en Angleterre, je n’ai parlé jusqu’ici que de l’insuffisance ou plutôt de la nullité des institutions relatives à cet objet : il me