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admises dans la communion anglicane ; les Te deum, les hymnes et les grandes antiennes, semblables à celles dont je viens de parler, sont les seules pièces de musique qu’on entend dans l’office. Mais il est des circonstances particulières, où l’on exécute des oratorios entiers avec un développement extraordinaire de luxe et de moyens d’exécution. Ces circonstances se nomment festivals ou musical meetings. En voici l’origine. Chaque comté fait, tous les deux ou trois ans, une souscription de bienfaisance, au profit de ses établissemens de charité, à laquelle les habitans des comtés voisins sont invités à se joindre, au moyen d’une fête musicale qui dure ordinairement trois jours. Chaque matin, un oratorio entier ou un choix de morceaux de divers oratorios est exécuté dans la cathédrale du chef-lieu du comté ; et chaque soir, un concert ou un bal réunit encore tous ceux que la curiosité a rassemblés. Les musiciens qu’on engage pour ces solennités sont toujours fort nombreux ; quelquefois on en compte quatre ou cinq cents. Dans le dessein d’exciter la curiosité du public et de l’attirer en foule, on engage les chanteurs et les instrumentistes les plus renommés ; mais quelquefois on s’éloigne du but principal, la bienfaisance, en accordant à certains chanteurs des sommes énormes, qui seraient plus utilement employées au soulagement des pauvres. Dans le temps de la grande vogue de madame Catalani, cette cantatrice a reçu deux mille guinées (plus de 50,000 francs) pour les trois journées d’un meeting. Quelques-uns de ces festivals ont offert un ensemble d’exécution digne d’un si grand objet ; mais plus souvent ces nombreux orchestres renferment beaucoup de mauvais musiciens qui, mêlés aux artistes de talent, gâtent l’ensemble. La précipitation qui règne dans l’organisation de ces fêtes ne permet pas, d’ailleurs, de faire les répétitions nécessaires ; dans ces derniers temps, il est même arrivé souvent qu’on n’a point répété du tout les morceaux qui devaient être exécutés. De toutes ces solennités musicales, les plus belles dont on ait conservé le souvenir, sont celles qui eurent lieu en 1786 et 1787, en mémoire de Handel et près de son tombeau, dans l’abbaye de Westminster. La première année, près de sept cents musiciens furent réunis, et l’on fit des répétitions qui durèrent pendant plusieurs jours. Tous les grands chanteurs de l’époque s’y trouvaient.