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aux Français aucune des qualités nécessaires pour la culture de cet art.

L’opinion souvent manifestée par les écrivains du continent, place les Anglais au degré le plus bas de l’échelle des facultés musicales. Cette opinion est-elle fondée ? Voilà ce qu’il s’agit d’examiner. Au premier aspect, je serais tenté de partager les idées communément répandues à cet égard ; mais je sais que ce n’est pas sur l’apparence que des questions de cette nature peuvent être décidées. Avant tout, il faut voir si les institutions favorisent en Angleterre les progrès de la musique ; puis nous déduirons les conséquences de nos observations.

En Angleterre, on ne voit pas, comme en France, le gouvernement s’introduire dans les affaires particulières, réglant tout ce qui tient aux progrès de l’industrie, de la civilisation et des arts ; l’action du gouvernement anglais est à peu près nulle à cet égard. Point d’entraves de sa part, mais aussi point de secours. Chacun, abandonné à ses propres forces, règle l’emploi de ses moyens comme il l’entend, bien sûr qu’en se conformant aux lois de son pays, il ne rencontrera nulle part une administration méticuleuse, prête à lui demander compte de ses actions. C’est à cette indépendance d’une part, et à l’esprit d’association de l’autre, que les Anglais sont redevables de l’état avancé de leur civilisation. Mais ce qui est si utile au bien-être de la société, est-il aussi favorable au progrès des arts ? Cette absence de toute action et de toute protection du gouvernement, en ce qui concerne la musique, la peinture, l’architecture, est-elle un bien ? Voilà ce qu’on peut révoquer en doute. Dès qu’il s’agit d’industrie, de commerce, d’amélioration de la condition sociale, l’intérêt particulier avertit de ce qu’il faut faire, et bannit l’indifférence. Il n’en est pas de même pour les arts, dont la prospérité n’intéresse que faiblement quiconque n’est pas artiste ou amateur passionné. Si le public n’est pas précisément satisfait de la situation de ces arts, il ne songe pas non plus à faire d’efforts pour l’améliorer. L’esprit d’association, si utile pour d’autres choses, ne s’éveille pas pour eux, ou du moins ne produit pas les mêmes résultats, parce qu’il n’est pas constamment excité par l’appât d’avantages immédiats.

Il suffit de jeter un coup-d’œil sur l’histoire de la musique en