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REVUE DES DEUX MONDES.

il est aisé de me tromper ; je ne sais pas me défier d’une action que je ne voudrais pas faire moi-même.

OCTAVE.

Si tu escaladais les murs ?

CŒLIO.

Entre elle et moi est une muraille imaginaire que je n’ai pu escalader.

OCTAVE.

Si tu lui écrivais ?

CŒLIO.

Elle déchire mes lettres, ou me les renvoie.

OCTAVE.

Si tu en aimais une autre ! Viens avec moi chez Rosalinde.

CŒLIO.

Le souffle de ma vie est à Marianne ; elle peut d’un mot de ses lèvres l’anéantir ou l’embraser. Vivre pour une autre me serait plus difficile que de mourir pour elle ; ou je réussirai, ou je me tuerai. Silence ! la voici qui rentre ; elle détourne la rue.

OCTAVE.

Retire-toi, je vais l’aborder.

CŒLIO.

Y penses-tu ? dans l’équipage te voilà ! essuie-toi le visage ; tu as l’air d’un fou.

OCTAVE.

Voilà qui est fait. L’ivresse et moi, mon cher Cœlio, nous nous sommes trop chers l’un à l’autre pour nous jamais disputer ; elle fait mes volontés comme je fais les siennes. N’aie aucune crainte là-dessus ; c’est le fait d’un étudiant en vacance qui se grise un jour de grand dîner, de perdre la tête et de lutter avec le vin ; moi, mon caractère est d’être ivre, ma façon de penser est de me laisser faire, et je parlerais au roi en ce moment, comme je vais parler à ta belle.

CŒLIO.

Je ne sais ce que j’éprouve. — Non ! ne lui parle pas.

OCTAVE.

Pourquoi ?