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REVUE DES DEUX MONDES.

Ô mon ami, tu ignoreras toujours ce que c’est qu’aimer comme moi. Mon cabinet d’étude est désert ; depuis un mois, j’erre autour de cette maison la nuit et le jour. Quel charme j’éprouve, au lever de la lune, à conduire sous ces petits arbres, au fond de cette place, mon chœur modeste de musiciens, à marquer moi-même la mesure, à les entendre chanter la beauté de Marianne ! Jamais elle n’a paru à sa fenêtre ; jamais elle n’est venue appuyer son front charmant sur sa jalousie.

OCTAVE.

Qui est cette Marianne ? est-ce que c’est ma cousine ?

CŒLIO.

C’est elle-même, la femme du vieux Claudio.

OCTAVE.

Je ne l’ai jamais vue. Mais à coup sûr, elle est ma cousine. Claudio est fait exprès. Confie-moi tes intérêts, Cœlio.

CŒLIO.

Tous les moyens que j’ai tentés pour lui faire connaître mon amour ont été inutiles. Elle sort du couvent ; elle aime son mari, et respecte ses devoirs. Sa porte est fermée à tous les jeunes gens de la ville, et personne ne peut l’approcher.

OCTAVE.

Ouais ! est-elle jolie ? — Sot que je suis ! tu l’aimes, cela n’importe guère. Que pourrions-nous imaginer ?

CŒLIO.

Faut-il te parler franchement ? ne te riras-tu pas de moi ?

OCTAVE.

Laisse-moi rire de toi, et parle franchement.

CŒLIO.

En ta qualité de parent, tu dois être reçu dans la maison.

OCTAVE.

Suis-je reçu ? je n’en sais rien. Admettons que je suis reçu. À te dire vrai, il y a une grande différence entre mon auguste famille et une botte d’asperges. Nous ne formons pas un faisceau bien serré, et nous ne tenons guère les uns aux autres que par écrit. Cependant Marianne connaît mon nom. Faut-il lui parler en ta faveur ?