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HISTOIRE DES ANCIENS PEUPLES ITALIENS.

ses bibliothèques et ses archives, et probablement continueront d’y dormir inconnus, jusqu’à ce que cette belle et glorieuse nation, sortant de l’atmosphère ténébreuse qu’on a épaissie autour d’elle, se réchauffe au soleil de la civilisation, qui, de nos jours, ranime et féconde des contrées plus heureuses. Les trésors littéraires du Vatican, ouverts à tous, fourniraient de précieux matériaux pour l’histoire du moyen âge et des temps postérieurs. D’autres bibliothèques, à Florence, à Venise, à Milan, demanderaient encore à être soigneusement fouillées par des hommes patiens et habiles. Les immenses travaux de Muratori auraient dû, ce semble, en provoquer de semblables ; mais ce nom illustre représente presque seul la gloire de l’Italie dans cette branche importante des connaissances humaines. L’édition si considérablement augmentée du Monasticon, de Dugdale, qu’on vient d’achever en Angleterre, est son plus beau monument de ce genre, moins remarquable toutefois par la critique et la science véritable, que par la somptueuse magnificence qui a présidé à son exécution matérielle. Une riche aristocratie a voulu un ouvrage de luxe, un livre démesurément cher ; elle l’a eu.

La collection vraiment nationale, commencée en Allemagne d’après les vues patriotiques et sous la direction du comte de Stein, aura, si jamais elle se termine, un autre caractère, nous le croyons. Mais, puisque nous avons nommé l’Allemagne, c’est ici le lieu de lui rendre la justice qui lui est due, et de reconnaître hautement l’incontestable supériorité qu’elle a acquise, depuis un demi-siècle, dans la culture des sciences historiques. Au moment où la France, absorbée tout entière par sa révolution politique, détournait ses regards du passé pour les arrêter uniquement sur l’avenir qu’elle préparait au monde ; lorsque, ouvrant la carrière où l’Europe la suit, elle s’abandonna, comme Colomb, aux vents et aux tempêtes pour découvrir de nouveaux rivages et un ciel nouveau ; lorsqu’elle dit aux peuples étonnés, aux peuples assoupis dans leur vieille misère : C’est assez de ce qui fut ; je vous créerai d’autres destins : alors la laborieuse et pensive Allemagne, occupant la place que la France quittait, laissa celle-ci remuer le présent, et tourna son activité vers un but exclusivement intellectuel. Elle entreprit en quelque sorte de reconstruire, à l’aide des faits et de la théorie philoso-