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REVUE. — CHRONIQUE.

condition d’un pauvre ami des arts serait aussi par trop dure, s’il ne pouvait gémir tout haut sur les attentats dont ils sont victimes, sans être pris au collet et condamné à les réparer incontinent et à ses frais. M. de Montalembert ne s’est nullement engagé, même du consentement des propriétaires, à guérir toutes les plaies qui ont été infligées aux églises, aux châteaux et aux autres monumens qu’il a eu la douleur de visiter ; en conséquence, il se permettra de décliner l’offre généreuse qu’on veut bien lui faire, au risque même d’être traité à son tour de vandale par le public de M. Charlemagne Dupuy.

Le même article a suscité une réclamation curieuse de la part du Mémorial Artésien. Ce journal repousse avec chaleur l’accusation portée par M. de Montalembert contre un membre du conseil municipal de Saint-Omer, qui aurait sollicité et obtenu la destruction des ruines de l’abbaye de Saint-Bertin, parce que leur ombre nuisait aux tulipes de son jardin. Il paraîtrait, d’après le Mémorial, que ce ne sont pas ses propres tulipes, mais bien celles d’un de ses amis, que l’honorable municipal a voulu débarrasser de l’ombre monacale, et que, par conséquent, l’acte de vandalisme qu’on lui impute ne doit et ne peut être regardé que comme un trait de pure et intelligente amitié. Nous accueillons avec empressement cette précieuse rectification, et nous la livrons à la sagacité de nos lecteurs.

Le travail de M. de Montalembert a du reste éveillé une vive sympathie en Belgique, où il a été réimprimé avec des notes intéressantes sur l’état de plusieurs monumens de ce pays, et sur divers actes de vandalisme, qui y ont été commis, notamment sous l’administration française. Elles renferment des détails très curieux sur ces travaux de restauration, qui ont été entrepris, ou achevés à la cathédrale de Bruxelles et à l’hôtel-de-ville de Louvain, et qui sont dus au talent et aux lumières de M. Vanderstraeten. Cet artiste paraît avoir parfaitement compris la nature et l’importance de ce genre de développement, le seul qui reste à l’architecture détrônée et dépopularisée de notre temps. — Nous y voyons aussi qu’en Prusse, il existe un édit royal, qui défend la destruction de tout édifice qui a un caractère monumental et historique, et qui veut que dans toutes les restaurations d’édifices de ce genre on conserve, autant que possible, le caractère et le style de l’architecture primitive ; à ceux qui verraient dans ces mesures une restriction à la libre disposition des propriétés, nous opposerons les ordonnances de police, qui, dans une foule de cas, en France, ne permettent pas de remuer une pierre à une façade de maison ou de la peindre de telle ou telle couleur sans autorisation préalable ; ce à quoi nous devons l’ineffable satisfaction de contempler des créations dans le genre de l’enfilade de la rue de Rivoli. Arbitraire pour