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REVUE. — CHRONIQUE.

lopism, pour désigner toute relation de voyage où la stricte vérité a été moins consultée que le désir de plaire au lecteur en l’amusant à tout prix. On a accusé la spirituelle voyageuse d’avoir indignement caricaturé la nation qu’elle prétendait peindre ; ses vues générales ont été ridiculisées ; la plupart des faits qu’elle rapporte mis en doute ; enfin on s’est moqué sans pitié de cette susceptibilité aristocratique qui a eu tant à souffrir de la démocratie des États-Unis. Voici un nouveau voyageur, M. James Stuart, qui a visité cette contrée depuis mistress Trollope, et qui a vu les choses sous un point de vue bien différent. Le livre est intitulé : Three Years in north America (trois années dans l’Amérique du Nord), et vient de paraître à Édimbourg et à Londres.

M. James Stuart a résidé aux États-Unis de 1828 à 1831. Il a visité en détail l’état de New-York, et descendu le fleuve Saint-Laurent, depuis la cataracte de Niagara jusqu’à Montréal : de là, il est revenu sur le littoral, qu’il a longé jusqu’à la Nouvelle-Orléans ; puis remontant le Mississipi et l’Ohio, il a regagné par cette voie le point d’où il était parti. Dans le récit de cet immense voyage, M. James Stuart montre partout une âme élevée et sensible, une bienveillance envers les hommes et les choses qui n’altère en rien son impartialité. Il doit être ce qu’en Angleterre on appelle a perfect gentleman. L’opinion d’un tel homme est de quelque poids, et comme en maintes occasions, il émet un jugement tout-à-fait opposé à celui de mistress Trollope, quelques extraits de l’ouvrage ne me paraissent pas hors de propos.

L’égalité entre tous les citoyens et le respect de soi-même qu’elle engendre dans toutes les classes de la société, forment un des traits caractéristiques du peuple des États-Unis. M. James Stuart insiste là-dessus en beaucoup d’endroits, et surtout en parlant de la conduite des domestiques dans les auberges.

« Les gens de cette maison paraissaient très attentifs à toutes les demandes des voyageurs ; mais vous n’avez aucune réparation à attendre, s’ils oublient ou refusent de se conformer à vos désirs, lorsqu’ils sortent de la règle ordinaire. S’ils sont Américains et non hommes de couleur, ils reçoivent rarement l’argent que peuvent leur offrir les voyageurs ; une offre de ce genre est si généralement regardée comme une insulte, que le plus prudent est de s’en abstenir. Toutes les fois que les garçons sont des mulâtres ou des Irlandais, ou généralement parlant des Européens, ils reçoivent assez volontiers une gratification. Mais si le voyageur a l’intention d’en donner une, il est mieux qu’il le fasse en particulier, en prévenant d’avance la personne de son projet.

« À Saratoga, ma femme ayant demandé une blanchisseuse pour faire