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REVUE DES DEUX MONDES.

Malgré l’impossibilité où nous nous trouvons de résoudre complètement le problème, peut-être pourrions-nous cependant faire du moins pressentir dès à présent quelle en devrait être la véritable solution ?

Abandonnons pour cela, au moins pour quelques instans, la langue ordinaire de la philosophie, puis traduisons la question dans un autre langage, qui, la rendant, en quelque sorte, visible aux yeux, la rende en même temps plus intelligible.

Ne l’a-t-on pas dit plusieurs fois : l’univers matériel n’est rien autre, en définitive, que la manifestation visible d’un ordre de choses invisibles ? Eh bien ! que ces mots soient pour nous l’expression de la vérité.

En adoptant ce point de vue, rien ne s’oppose à ce que nous nous représentions le mouvement intellectuel au moyen duquel l’humanité accomplit son évolution historique, sous la forme, sous l’image des mouvemens physiques que nous voyons s’exécuter dans le monde matériel. Ces mouvemens physiques seront dès-lors comme autant de symboles du mouvement moral. Ils en seront la traduction apparente, l’expression visible.

Les forces intellectuelles au moyen desquelles s’accomplit le grand mouvement moral de l’humanité, pourront de même être considérées comme traduites, comme exprimées par les forces physiques qui produisent le mouvement matériel, et il en sera de même, enfin, des lois du mouvement intellectuel dont nous nous occupons. Nous pourrons aussi lire emblématiquement ces lois dans les lois qui régissent le monde matériel.

Or, personne n’ignore sous quelles conditions s’exécute un mouvement quelconque en ligne courbe. Une force agit sur le corps en mouvement, cette force est nécessairement décomposable en deux forces secondaires ; ces forces secondaires agissent dans des directions différentes, et de plus elles devront se trouver entre elles dans un certain rapport d’intensité qui, se combinant avec l’angle formé par les lignes d’activité des forces secondaires, déterminera le caractère de la courbe parcourue par le corps en mouvement.

Le caractère de cette courbe pourra, par conséquent, subir un grand nombre de variations toujours correspondantes aux variations survenues dans le rapport d’intensité qui existe entre ces forces,