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NOTICE SUR COTTA.

succès par conséquent devait être moins populaire ; aussi Cotta ne les soutint que par de grands sacrifices. Les Annales, à leur origine, avaient été conçues en dehors des partis littéraires ; mais elles sont devenues, depuis quelques années, l’organe de l’école de Hegel, et elles reproduisent ce grand et intéressant mouvement philosophique qui a commencé à Berlin et qui se répand maintenant tous les jours davantage dans les autres parties de l’Allemagne.

Outre ces journaux, dont la renommée est devenue européenne, Cotta a fondé encore un grand nombre de feuilles politiques et littéraires. Toutes ces publications, jointes aux entreprises industrielles de Cotta et à ses occupations politiques, durent le détourner de ses études personnelles. Il n’a publié que quelques recherches spéciales sur les mathématiques, quelques discours politiques, et un ouvrage qui a paru en 1814, sur la famille Bonaparte.

La vie politique de Cotta a été fort diversement jugée ; en 1815, lorsqu’il fut nommé membre de la chambre wurtembergeoise, il prit d’abord place dans l’opposition libérale. Il s’est rattaché plus tard au parti du gouvernement, et ses ennemis en ont voulu voir la cause dans les titres et les dignités qui lui avaient été conférés ; mais le caractère connu de Cotta ne permet pas d’ajouter foi à une pareille imputation. Il faut d’ailleurs déclarer que Cotta prenait rarement part aux discussions proprement politiques ; c’était surtout dans les questions financières ou commerciales que son profond jugement et ses vastes connaissances se révélaient d’une manière souvent opposée aux vues du gouvernement. C’est à Cotta qu’est due la fondation de la caisse de secours dans le Wurtemberg, celle de la caisse d’épargne, celle de la société d’économie agricole ; c’est lui qui a rédigé le traité de commerce entre la Bavière, le Wurtemberg et la Prusse, et c’est après la conclusion de ce traité, qu’il fut décoré des ordres de ces trois pays. L’industrie et l’agriculture doivent aussi beaucoup à Cotta, qui, dans ses entreprises, avait toujours en vue le bien général, plutôt que son intérêt personnel.

Les services que Cotta avait rendus à sa patrie lui ont mérité le tribut d’éloges qui a été décerné à sa mémoire de toutes les parties de l’Allemagne. Celui qui voudra faire l’histoire de la nation allemande, pendant ces quarante dernières années, ne devra pas oublier Cotta, qui est une expression caractéristique de l’esprit allemand dans notre époque. Ce n’est que dans un pays de dévoûment pour la science, d’amour impartial et persévérant pour la vérité, que les livres peuvent devenir une puissance, et dans toute autre contrée on ne comprendrait ni la carrière de Cotta, ni ses succès, ni l’influence étendue qu’il avait fini par acquérir dans sa patrie. Nous sommes