Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 1.djvu/510

Cette page a été validée par deux contributeurs.
504
REVUE DES DEUX MONDES.

colonnes du chœur ont été transformées en pilastres ioniques avec accompagnement de chérubins en faïence. À Villeneuve d’Agen, la voûte extrêmement curieuse du chœur de Sainte-Catherine a été triplement badigeonnée en vert, jaune et blanc. À Agen, le curé de Notre-Dame, ancienne église des Dominicains, à deux nefs, d’un gothique sévère et pur comme toutes les fondations de cet ordre, a dépensé quatre-vingt mille francs pour y faire construire, à l’extrémité de chaque nef, un monstrueux autel dans le genre Pompadour, avec volutes, gonflures, et tout ce qui caractérise le bon goût du dix-huitième siècle ; plus une chaire en marbre creusée dans un des murs latéraux en forme de coquetier. Je n’ai pas été à Montauban, mais un jeune homme que j’ai vu, ramassait, il y a quelques mois, dans la chapelle d’une confrérie, des têtes charmantes provenant de sculptures du moyen âge que le ciseau d’un maçon faisait voler en éclats. À Auch, dan un diocèse administré d’une manière si éclairée par M. le cardinal d’Isoard, on avait sérieusement arrêté la démolition du jubé de l’admirable cathédrale, monument presque unique dans le midi de la France, mais qui avait le tort d’empêcher les fidèles de jouir assez complètement de la vue de l’officiant. Et ce honteux projet n’a été arrêté que par l’intervention d’un jeune homme étranger au pays.

À Périgueux, la cathédrale de Saint-Front, l’une des plus anciennes de France, dont toutes les parties, moins le clocher, sont antérieures au dixième siècle, a été badigeonnée en jaune du haut en bas, et pour mieux trancher sur le jaune, les pilastres, le profil des pleins cintres, les bordures des arcades ont été peintes en orange rougeâtre. Le portail de l’église encore plus ancienne de la Cité a été détruit et remplacé par une sorte de porte cochère bien blanche, bien nue et bien triangulaire. Au-dessus de cette nouvelle entrée de la maison de Dieu, et sans doute pour sa plus grande gloire, se lit en grandes lettres le nom du destructeur et du reconstructeur, Viger 1829. Ce monsieur a sans doute voulu se recommander ainsi à la publicité : je m’empresse de concourir autant que je le puis à l’accomplissement de son vœu.

À Bazas, jolie petite ville du Bordelais, il y a une merveilleuse cathédrale du gothique le plus pur, sans transepts, qui rappelle celle de Caudebec, que Henri iv appelait la plus belle chapelle qu’il eût jamais vue de sa vie, parce qu’il lui répugnait de donner le nom d’église à un édifice qui ne fût pas en forme de croix. Cette cathédrale est excellente de simplicité, d’élégance, d’unité. Les sculptures des trois portails de sa façade offrent des beautés du premier ordre : elles représentent la vocation de saint Pierre, le couronnement de Notre-Dame et le jugement dernier, avec le cortège obligé de saints et d’anges nichés dans les arceaux mêmes. Les an-