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III.

Il faut voir dans la dualité des sexes une des innombrables formes que revêtent les principes contraires pour se faire opposition.

Les individus se lient les uns aux autres dans la suite des temps par la naissance et la reproduction. Il n’est donc pas un seul des êtres organisés qui, dans chacune des espèces qui couvrent la surface de la terre, ne se rattache à tous ceux qui l’ont précédé, à tous ceux qui le suivront. On peut se représenter chacune de ces espèces comme une chaîne dont les anneaux se déroulent dans la série des temps, en même temps que sa trame s’étend dans l’espace. Puis, en outre, il faut aussi, en raison de la différence des sexes, se représenter chacun des anneaux de cette chaîne comme double, c’est-à-dire comme formé de deux anneaux, qui se rattachent tous deux, par le haut et le bas, aux mêmes anneaux, mais dont chacun est la répétition symétriquement exacte de celui qui lui est opposé.

IV.

Outre cette opposition des sexes, il s’en trouve encore une autre non moins remarquable dans la nature organisée. Celle-ci a lieu entre le règne végétal et le règne animal. Le végétal, avons-nous dit, s’assimile l’azote de l’air atmosphérique qu’il respire, puis il exhale l’oxigène ; l’animal fait tout le contraire.

Or, cette opposition radicale n’est, pour la philosophie de la nature, qu’une sorte de germe dont elle fait sortir une multitude d’autres oppositions, et de telle sorte, qu’elle arrive à nous faire apercevoir dans tout ce qui est organe, ou fonction dans la plante, le contraire d’un autre organe, d’une autre fonction dans l’animal ; elle opère de même ensuite pour l’animal à l’égard de la plante. Ces oppositions sont assez analogues à celles que le grand Haller exprimait d’une façon pittoresque, en disant que la plante avait son estomac dans ses racines, et l’animal, ses racines dans son estomac.