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EXCURSION DANS L’OYAPOCK.

bouchâmes ensuite la voie d’eau avec une chemise que nous mîmes en pièce. Une pluie violente qui survint pendant cette opération, et la nuit qui approchait, nous obligèrent de chercher un refuge dans un carbet en ruines, sur le bord de la rivière, ou nous passâmes la nuit.

Le lendemain, à midi, nous arrivâmes à l’embouchure du Yarupi, qui n’est éloigné que de dix lieues de l’habitation que nous avions quittée la veille. Un canot, conduit par deux jeunes Indiens qui venaient de pêcher dans l’Oyapock, y entrait en même temps que nous, et nous apprîmes d’eux que les premières habitations étaient fort loin dans le haut de la crique, mais que nous trouverions à peu de distance un abatis récent où travaillait leur famille qu’ils allaient rejoindre.

Les eaux du Yarupi, lorsque j’avais passé la nuit à son embouchure, trois semaines auparavant, étaient tellement basses, qu’il eût été impossible à nos canots d’y pénétrer, mais les pluies l’avaient rendu alors parfaitement navigable. Pendant trois lieues, nous ne rencontrâmes ni sauts ni barrages ; les bords de la rivière, taillés souvent à pic, offraient çà et là des éboulemens qui avaient entraîné des portions considérables de terrein, avec les arbres qu’elles supportaient, et plus d’une fois nous éprouvâmes des craintes en passant sous quelques-uns de ces derniers, qui ne tenaient plus au rivage que par l’extrémité de leurs racines. Nous aperçûmes bientôt les premiers indices de ce mouvement progressif qui rapproche chaque jour les Oyampis des blancs. Plusieurs abatis récemment brûlés indiquaient que ceux du Yarupi tendent aussi à descendre le long de l’Oyapock.

L’abatis que nous cherchions ne tarda pas à s’offrir à nous ; les Indiens auxquels il appartenait demeuraient à vingt-sept lieues de là dans le haut de la crique, et l’avaient commencé depuis peu. Il était situé sur un petit plateau élevé d’environ quarante pieds au-dessus du Yarupi, et l’on ne pouvait y monter que par un sentier presque à pic et de difficile accès. À mi-côte était un petit carbet à peine suffisant pour tendre quelques hamacs, dont quelques bagatelles nous valurent la possession momentanée pour la nuit. Les Indiens construisirent à la hâte un ajoupa dans leur abatis, et le lendemain au jour nous ne les revîmes plus ; ils étaient partis