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REVUE. — CHRONIQUE.

son courage : « Le glaive, dit-il, est un aspirant puissant, je combattrai pour ma jeune fiancée, malheur à qui voudra nous séparer. »

Un roi du nord ne pouvait mourir de mort naturelle sans imprimer une tache à son nom. Aussi, Bele, se sentant vieux, fait appeler ses fils et Frithiof. Il leur annonce que l’heure de la mort a sonné pour lui, il les exhorte à la concorde, à gouverner selon les lois. Ce discours de Bele est d’une harmonie admirable. Le paysan Thorsten Vikingsson, frère d’armes du roi, presque centenaire et cicatrisé comme une pierre runique, se lève, et dit : « Il ne convient pas que le roi s’en aille seul vers Oden ; nous avons partagé les vicissitudes de la vie, la mort, nous la partagerons aussi. »

Helge et Halfdan, fils du roi, sur la décision du peuple, héritent ensemble de la couronne de Bele ; Frithiof est fils unique, il s’établit paisiblement dans son vaste domaine. Mais ce riche héritage ne le satisfait point ; son jeune sang monte à ses joues, elles brûlent, il soupire sans cesse, et garde le silence. Son frère d’armes s’en inquiète : que peut avoir le jeune aigle ? n’a-t-il pas en abondance le lard jaune et le brun hydromel, et des skaldes dont les chants ne cessent jamais ? Frithiof rend enfin la liberté à son navire, la voile se gonfle ; il va trouver les fils de Bele, leur demande Ingeborg ; on le refuse avec mépris.

Ring, monarque d’une autre partie de la Norwège, annonce à son peuple que son choix s’est arrêté sur la fille de Bele. Ses écuyers partent avec fracas ; une longue file de skaldes les accompagnent en chantant les exploits des héros. Ils se présentent devant les frères d’Ingeborg. Helge, qui passe de préférence son temps avec les devins, consulte les dieux. Tous gardant un obstiné silence, il rejette la demande de Ring. Halfdan plaisante sur la vieillesse de Ring, qui, pour venger son injure, assemble une armée. Helge réclame alors le secours de Frithiof ; mais celui-ci reste inflexible. Il se rend près d’Ingeborg, dans le temple de Balder, et se décide enfin, à sa prière, à faire une nouvelle tentative près de Helge. Il vient en dire le résultat à sa bien-aimée.

« Je me rendis à l’assemblée. Sur la colline sépulcrale, sur ses flancs couverts de gazon, bouclier contre bouclier, le glaive nu, les hommes du nord debout formaient anneau sur anneau jusqu’au