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IL PIANTO.

Que saint Pierre au soleil, sur ses degrés luisans,
Voit remonter encor la pompe des vieux ans.
À quoi bon tant de voix, de cris et de cantiques,
Les milliers d’encensoirs fumant sous les portiques,
Le chœur des prêtres saints déroulant ses anneaux,
Et la pourpre brûlante aux flancs des cardinaux ?
Pourquoi le dais splendide avec son front qui penche,
Et le grand roi vieillard, dans sa tunique blanche,
Superbe et les deux pieds sur le dos des Romains,
De son trône flottant bénissant les humains ?
Morts, morts, sont tous ces bruits et cette pompe sainte,
Car ils ne passent plus le Tibre et son enceinte ;
Mort est ce vain éclat, car il ne courbe plus
Que des fronts de vieillards ou de pâtres velus.
Tous ces chants n’ont plus rien de la force divine,
C’est le son mat et creux d’une vieille ruine,
C’est le cri d’un cadavre encor droit et debout
Au milieu des corps morts qui l’entourent partout.


Hélas ! hélas ! la foi de ce sol est bannie,
La foi n’a plus d’accent pour parler au génie,
Plus de voix pour lui dire, en lui prenant la main :
Bâtis-nous vers le ciel un immortel chemin.
La foi, source féconde en sublime rosée,
Ne peut plus retomber sur cette terre usée,
Et remuant la pierre au fond de ses caveaux,
Faire jaillir le marbre en milliers de faisceaux ;
La foi ne pousse plus de sublimes colonnes,
Plus de dômes d’airain, plus de triples couronnes,