Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 8.djvu/617

Cette page a été validée par deux contributeurs.
607
REVUE. — CHRONIQUE.

diana nous était suspect, venant si vite après le succès éclatant et mérité du premier. Nous ne voulions voir dans Valentine que l’exhumation de quelque étude vieillie au fond d’un portefeuille, ou bien la production prématurée de quelque ébauche incomplète arrachée à l’écrivain par l’avide sollicitation de ses éditeurs. L’égoïste spéculation, la spéculation impitoyable, qui s’attache soudain, comme un lierre, à tout nom qui surgit, à tout talent qui s’élève, se souciant peu de les étouffer, pourvu qu’elle profite et s’enrichisse de leur sève ; la hideuse spéculation nous apparaissait déjà sous la forme de la publication nouvelle de M. G. Sand.

Mais nous avons lu Valentine, et nous nous sommes bientôt reproché sévèrement l’injustice et la légèreté de nos soupçons.

Valentine est un livre qu’il faut placer aussi haut qu’Indiana, sinon au-dessus.

Le défaut d’Indiana, c’était peut-être le manque d’unité. La composition n’avait pas été suffisamment mûrie ; chaque portion de l’édifice était belle isolément, mais l’ensemble irrégulier.

Il n’en est pas ainsi dans le nouveau roman. Vous y apercevez d’abord une fatale et saisissante figure qui domine de bien haut les autres, et les fait mouvoir de son seul regard : c’est Bénédict.

C’est une belle et neuve situation que celle de ce jeune homme au milieu de l’amour de ces trois femmes agenouillées, dont il tient les ames entre ses mains. Bénédict est le pilier de tout le drame. En s’écroulant, il écrasera sous ses débris ces créatures aimantes et dévouées qui priaient encore à ses pieds. L’œuvre alors sera pleine et accomplie.

L’action, dans Valentine, s’avance constamment rapide et entraînante vers le dénouement. Il semble seulement qu’à cette marche impétueuse elle se soit fatiguée outre mesure, et que les forces lui aient quelque peu manqué sur la fin de sa course.

Quant au style, c’est encore celui d’Indiana. Quel éloge meilleur lui pourrions-nous donner ?

Quelles destinées meilleures que celle de sa sœur aînée pourrions-nous aussi promettre à Valentine ? Je ne sais. Et pourtant Valentine a peut-être plus de titres et de droits encore à une haute fortune littéraire.


NOUVEAUX CONTES PHILOSOPHIQUES, PAR M. DE BALZAC[1].

Ce nous devient une tâche fort difficile que de parler des livres de M. de Balzac. Cet intarissable écrivain s’obstine dans ses défauts avec

  1. Chez Gosselin.