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CHRONIQUE DES ALBIGEOIS.

Qui fût de meilleure et de plus chrétienne croyance que lui.
Mais puisque le père est mort et le fils déshérité,
Rends-lui sa terre, seigneur pape, et maintiens ta dignité,
Et si tu ne la lui livres à jour fixe et prochain,
Je te somme de restitution et de justice,
Au jour du grand jugement, là où nous tous et toi-même serons jugés. »

« Oh ! qu’il l’a noblement requis ! se disent l’un à l’autre les barons ! »
— « Ami, répond le pape, justice sera faite. »
Et là-dessus il rentre dans son palais avec ses conseillers,
Et les comtes restent dans la salle au pavé de marbre.
Le pape rentre dans son palais, dans un jardin,
Pour se distraire de son chagrin et se récréer un peu.


Cette première scène, si forte et si vraie, est immédiatement suivie d’une autre non moins intéressante, non moins dramatique et plus importante encore sous le rapport historique. Cette fois le pape est seul avec ses prélats et ses ecclésiastiques, et un grand débat s’élève entr’eux, les uns parlant avec force et chaleur en faveur des comtes spoliés contre Simon de Montfort, les autres, au contraire, à la tête desquels continue à figurer Folquet, le troubadour-évêque, faisant tous leurs efforts, usant de toute leur habileté pour faire confirmer la sentence rendue au concile de Montpellier, au bénéfice de Simon. — Le pape Innocent iii est représenté, dans ce débat, comme favorablement disposé pour les comtes spoliés, et comme convaincu qu’il y a eu, en toute cette affaire, des intrigues et des injustices dont il gémit ; et cette conviction ressort vivement et à diverses reprises des discours que lui prête notre historien populaire. Cependant il cède à la majorité des évêques du concile et à la crainte des conséquences fâcheuses que pourrait avoir, pour l’autorité et la dignité de l’église, un retour sur les décisions prises au détriment du comte de Toulouse. — Toute cette discussion, je le répète, est pleine de vie et d’intérêt ; il ne s’y trouve pas un trait qui ne mérite plus ou moins d’attention de la part de l’historien, même sur les points où notre auteur vulgaire contredit, ou semble contredire des témoignages accrédités.

Néanmoins je n’essaierai pas de traduire cette seconde scène,