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avec un superbe mépris comme ses confrères, comme M. Corbière surtout, qui nous écrase sans pitié sous les enfléchures, les drailles, les culs-de-porc, les queues-de-rat et les drisses.

Le livre de M. Jal n’est donc pas seulement un livre agréable et amusant ; par la littérature maritime dont nous sommes inondés, c’est un livre essentiel. C’est un manuel nécessaire ; c’est le dictionnaire indispensable d’une langue qu’il nous faut étudier à fond et par principes, sous peine de ne rien absolument comprendre à tous les chefs-d’œuvre qu’elle nous menace de produire.

En s’embarquant aussi dans la littérature maritime, M. de Lansac, l’auteur de God-Run, a pris, selon nous, un excellent parti. Tant qu’il navigue et tient la mer, cet écrivain se montre de mœurs douces et ne verse qu’avec une louable économie le sang de ses personnages. Mais touche-t-il le rivage, aborde-t-il un instant, c’est un tout autre homme. Il ne se plaît plus qu’aux scènes de carnage. S’il descend à terre, s’il fait quelques pas sur le pavé, ce n’est jamais que pour y écraser inhumainement les belles têtes de ses héroïnes.

Parmi les divers contes qui composent le volume de M. de Lansac, nous avons trouvé cependant un morceau moins frénétique et moins ensanglanté que les autres.

Ce morceau, c’est la Duchesse. Voici l’histoire :

Plus heureux que le père Enfantin, dans l’essai de ses regards sur M. Delapalme, l’avocat-général, un capitaine de vaisseau séduit irrésistiblement, par la puissance des siens, la femme d’un certain duc, et l’enlève sur un joli yacht.

Mariez-vous donc ! s’écrie là-dessus M. de Lansac, en concluant.

Mariez-vous donc ! réflexion non moins profonde qu’ingénieuse et fine, et qui termine dignement ce piquant récit maritime.

Mariez-vous donc en effet, pour que des corsaires viennent fasciner vos femmes et vous les voler !

DEUX MOIS DE SACERDOCE, PAR M. A. LABUTTE[1].

En ce siècle de livres in-octavo, nous, que notre état condamne à les lire, pauvres reviewers que nous sommes, disposés d’abord pour les humbles in-dix-huit, à une complète bienveillance, nous voudrions vraiment pouvoir déclarer que l’imperceptible volume de M. Labutte dit plus de choses qu’il n’est gros, et se distingue par la qualité, sinon

  1. Chez Abel Ledoux.