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REVUE. — CHRONIQUE.

qui figure dans le Serment sur la tête de maître Andiol l’aubergiste. Ils ont trouvé que cette coiffure était indigne de paraître au grand Opéra, qu’elle en déshonorait la scène, et devait être reléguée aux Variétés. Sur cette question, nous sommes d’un avis entièrement opposé. L’emploi du bonnet de coton dans l’opéra nous paraît au contraire une hardiesse digne d’éloge, et ne doit pas, selon nous, être moins encouragé que l’usage du mot propre dans la poésie. Le bonnet de coton, surtout quand il est frais et blanc comme celui de Dérivis, est très-fort de mise, et peut se produire partout. Il s’était, au surplus, déjà récemment hasardé, quoique timide et honteux, au troisième acte du ballet de la Tentation, sur le coin de l’oreille des diables cuisiniers, à travers les soupiraux du pavillon. Mais ce sera du Serment que datera l’avénement définitif du bonnet de coton à l’Académie Royale de Musique.

Le Théâtre-Italien nous a produit déjà quelques-uns des débuts qu’il nous avait promis. La marche a été ouverte par madame Boccabadati. Madame Boccabadati est une cantatrice habile et savante, dont Matilda di Sabran n’a pu nous permettre d’apprécier encore bien le talent. Mais un succès incontestable et sans restriction a, de prime abord, accueilli l’apparition de madame Eckerlin et de Tamburini dans la Cenerentola.

Le chant de Tamburini tient du prodige. Nous n’avions pas jusqu’ici l’idée de tant de douceur et de flexibilité unies à tant de puissance. La grâce de la force est bien la suprême grâce.

La belle et touchante voix de madame Eckerlin émeut profondément. Elle est venue faire retentir en nos ames des cordes qui ne vibraient plus depuis que madame Pasta nous avait quittés.

Félicitons-nous ! Quoi qu’il arrive, quelque poignantes que soient les inquiétudes qui pourront nous assiéger cet hiver, nous aurons des soirées de larmes, des soirées de consolation et d’oubli.

LE SALMIGONDIS[1].

Nous avions eu déjà des contes bruns, des contes bleus, des contes noirs ; voici maintenant des contes de toutes les couleurs ; voici le Salmigondis.

Si nous en croyons sa préface, Salmigondis, c’est moins que rien ; c’est un livre qui n’en est pas un, et cependant c’est un livre glané dans toutes les intelligences et parmi toutes les célébrités ; c’est un livre sans conséquence, et pourtant c’est un livre qui a vingt chances pour une d’être amusant.

  1. Chez Fournier.