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MŒURS DES AMÉRICAINS.

à table, nous assura que cet accident se renouvelait assez souvent. Une autre esclave de la maison nous dit « que pour son compte elle aimait bien la religion, mais qu’elle ne tombait jamais en convulsion, parce que, mettant toujours sa plus belle robe pour aller à l’église, elle craignait de la chiffonner et de la déchirer. »


Voilà ce qui se passe dans les villes. Les campagnes étant moins riches, et la population s’y trouvant beaucoup plus éparpillée, il faut procéder autrement. De là, les camp-meetings, ou réunions dans les bois, dont on va lire la description.


« Ce fut dans le courant de cet été qu’après l’avoir long-temps désirée, je trouvai enfin l’occasion d’assister à un camp-meeting. Un Anglais et sa femme, qui s’y rendaient, m’offrirent dans leur voiture une place, que j’acceptai avec empressement. La scène devait se passer dans un lieu sauvage et écarté, sur les confins de l’état d’Indiana.

« La perspective de passer une nuit dans les sombres forêts d’Indiana n’était assurément pas attrayante ; mais je m’armai de tout mon courage, et je partis, fermement déterminée à voir de mes yeux et à entendre de mes oreilles ce que c’était réellement qu’un camp-meeting. On m’avait dit qu’assister à un camp-meeting, c’était se trouver sur la porte du ciel et le voir ouvert devant soi ; on m’avait dit, d’un autre côté, que c’était avoir franchi les portes de l’enfer et en contempler toutes les horreurs : ce double renseignement avait piqué ma curiosité. Dans les deux cas, ce devait être un spectacle extraordinaire et qui me promettait une suffisante compensation aux fatigues d’une longue course, et à une nuit passée sans dormir à la belle étoile.

« Nous atteignîmes le lieu de la scène à onze heures du soir, et le spectacle le plus pittoresque se présenta à nos regards. Le terrein qu’on avait choisi était situé au milieu d’une forêt vierge. C’était une clairière d’environ vingt acres d’étendue, qui semblait, du moins en partie, avoir été ménagée pour cette cérémo-