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LES CONFIDENCES.

— Eugénie ! ma bien-aimée ! murmura-t-il en la serrant contre son cœur.

— Tu n’as couru aucun danger ? interrompit-elle, en examinant son mari avec anxiété.

— Du danger !… As-tu donc attribué mon retard à quelque malheur ? Aucune autre pensée n’a-t-elle préoccupé ton esprit ? Et il était là, devant elle, avec une expression d’inquiétude si marquée, qu’elle ne put échapper même à la confiante Eugénie.

— Madame de Merci ! s’écria-t-elle.

Octave ne répondait pas, il s’était caché le visage dans ses mains en entendant l’exclamation accusatrice de sa femme.

— Il m’a trahie ! cria la malheureuse enfant, en tombant dans les bras de sa cousine qui s’était approchée d’elle ; car, au peu d’étonnement qu’exprimaient les traits de la marquise, il était visible que depuis long-temps elle soupçonnait la véritable cause du retard du colonel.

— Non, mon Eugénie, non, ma bien-aimée, dit Octave pleurant et priant aux genoux de sa femme, non, je te le jure, toi seule je t’aime, et jamais, jamais une autre ne pourra occuper un cœur qui est tout à toi.

— Eh bien donc ! demanda madame de Barènes avec une sécurité d’enfant, et en relevant sa tête qu’elle avait cachée dans le sein de la marquise, pourquoi es-tu revenu si tard ?

— Ange de ma vie ! tu es mon seul amour ! disait le colonel en la pressant contre son cœur, et s’efforçant par de tendres caresses d’affermir sa confiance.

— As-tu donc éprouvé quelque accident ? demanda de nouveau madame de Barènes, qui ne songeait plus à madame de Merci ; parle Octave, ce doute est affreux.

— Mais tu seras bien bonne ! dit son mari.

— Ne m’aimes-tu pas ? répondit Eugénie.

M. de Barènes était enhardi par tant d’amour.

— Tu sais le vieil adage ? reprit-il : Ce que femme veut, Dieu le veut. Il m’a bien fallu rester, puisqu’ainsi le voulait madame de Merci.