Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 7.djvu/442

Cette page a été validée par deux contributeurs.
438
REVUE DES DEUX MONDES.

Tout près du lit, Gunar, caché dans l’ombre, écoute,
Et de son noble ami, nul affront ne redoute.

À peine à ses côtés Brunhilde le sentit,
Que d’être venu là Sigurd se repentit.
À terre, en un clin d’œil sa forte main le lance,
Sigurd tombe avec violence
Et sur un banc sa tête retentit.
L’homme fort sur ses pieds se dresse
Et dans ses bras veut l’enlacer,
Mais c’est elle, au moment qu’il croit la terrasser,
Qui rudement contre le mur le presse.
Elle serra ses mains d’un effort si puissant,
Que des ongles jaillit du sang.
Elle veut attacher ses bras comme la veille,
Mais de Sigurd enfin la colère s’éveille ;
Il s’arrache à ces nœuds qu’il brise en rugissant,
Et de toute sa force à son tour la pressant,
Il fait crier les os de la guerrière.
Alors Brunhilde en rougissant
Ainsi parla d’une bouche moins fière :
Gunar, écoutez-moi, je jure dès ce jour
De ne m’opposer plus à votre noble amour ;
Rien n’aurait fait ployer mon âme,
Mais je vois que vous méritez
Que l’on cède à vos volontés.
Vous savez dompter une femme.
À ce discours Gunar content
S’approche et se place auprès d’elle,
Sigurd s’échappe, et depuis cet instant,
La guerrière qu’on craignait tant,
Devint comme une autre mortelle.

Mais Sigurd, dans la lutte, a repris l’anneau d’or
Qu’il lui donna sur la montagne,
Et que son doigt portait encor.
Puis Sigurd va dormir auprès de sa compagne.