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BATAILLE DE LA TABLADA.

gouvernement. Cette révolution, qui reçut le nom de mouvement du premier décembre, fut le signal d’une guerre civile qui commença sous d’heureux auspices pour les unitaires, mais qui, plus tard, devait les engloutir. Lavalle, nommé gouverneur, eut à combattre peu de jours après Dorrego, qui avait fui dans la campagne, où il avait rassemblé ses partisans à l’aide d’un homme qui jouissait d’une influence immense sur les gauchos, José Manuel Rosas, aujourd’hui gouverneur de Buenos-Ayres. Vaincu à la première rencontre qui eut lieu, Dorrego fut pris, condamné à mort sans jugement et aussitôt exécuté. Rosas le remplaça et continua les hostilités. Lopez, gouverneur de la province de Santa-Fé, se joignit à lui, et tous deux, vaincus et vainqueurs tour-à-tour dans une foule de petits combats, s’avancèrent jusqu’aux portes de la ville. Avant qu’ils eussent pris une attitude aussi menaçante, Lavalle avait détaché un corps d’environ deux mille cinq cents hommes sous les ordres du général Paz, militaire de quelque réputation et homme modéré, pour abbattre les gouverneurs fédéraux de l’intérieur.

Voici comment étaient partagées les nombreuses provinces de la république pour ou contre celle de Buenos-Ayres. L’Entre-Rios, Corrientes et Missiones gardaient une espèce de neutralité, prêtes à embrasser le parti du plus fort. Santa-Fé, Cordoba et la Rioja étaient fédérales et secondées par San-Luis et Mendoza. Le Tucuman et Santiago del Estero avaient embrassé le parti unitaire, et la même opinion dominait, quoique faiblement, à San Juan et Catamarca. Quant aux provinces de Salta et de Jujuy, trop éloignées du théâtre des évènemens, elles paraissaient n’y prendre aucune part.

Du reste, c’était moins l’opinion des populations que celle des hommes que le hasard avait mis à leur tête, qui jetait ces provinces dans tel ou tel parti. Parmi ces chefs, deux seuls, appartenant au parti fédéral, méritent une mention à part. Le premier était Bustos, gouverneur de Cordoba, la province la plus riche et la plus populeuse après celle de Buenos-Ayres. Depuis plusieurs années, il s’y était emparé du pouvoir et s’y était maintenu plutôt par son habileté pour l’intrigue que par la