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Il n’y avait plus qu’à faire accepter cette constitution par les provinces, et là gisait toute la difficulté ; car, à mesure qu’on l’édifiait, la presse fédérale n’avait cessé de l’attaquer avec la plus extrême violence, et elle était toute puissante dans l’intérieur[1]. On crut pouvoir surmonter cet obstacle en envoyant près de chaque gouverneur fédéral des députés du congrès chargés de leur présenter son ouvrage, et de les inviter à l’union si nécessaire pendant une guerre extérieure. Ces envoyés revinrent sans avoir rien obtenu : la plupart n’avaient pas été admis officiellement ou n’avaient reçu qu’un accueil dérisoire, et quelques-uns même avaient été renvoyés sans être entendus. Ceci se passait au mois de juin 1827. Presque en même temps, un plénipotentiaire, envoyé à Rio-Janeiro pour traiter de la paix sous l’influence de l’Angleterre, revint avec un traité préliminaire contenant des conditions si honteuses, que l’opinion publique en fut soulevée et les rejeta d’une commune voix. Les fédéraux accusèrent hautement le gouvernement de trahir la patrie. Alors le président Rivadavia, dont la position n’était plus tenable, donna sa démission, et avec lui le pouvoir échappa des mains des unitaires. Les fédéraux s’en saisirent ; le congrès fut dissous, une chambre des représentans de la province convoquée, et Dorrego nommé gouverneur. Son administration n’éprouva aucun obstacle, car l’armée était alors sur le territoire du Brésil et n’avait pris aucune part à ces changemens ; mais il était facile de prévoir qu’en définitive ce serait elle qui déciderait du sort de la république. Les choses restèrent dans cet état jusqu’à la fin de 1828, qu’une paix glorieuse fut imposée au Brésil, et l’indépendance de la province de Montévideo reconnue. L’armée revint à Buenos-Ayres sous les ordres du général Lavalle, et peu de jours après son arrivée elle renversa le

  1. À cette époque onze journaux quotidiens et hebdomadaires paraissaient à Buenos-Ayres, parmi lesquels deux étaient rédigés en anglais et un en français ; la plupart s’occupaient exclusivement de politique, et tous se faisaient une guerre aussi acharnée que les nôtres en ce moment. Il en existait en outre plusieurs dans les provinces.