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REVUE. — CHRONIQUE.

assez bien leur titre de Mélancoliques, au moins par le fond et le choix des sujets. Ce sont souvent des ballades à la tombe, des odes sur la fin du monde, des sonnets rêveurs, toutes pièces qui ne sont pas la plupart dépourvues de grâce, d’élégance et d’harmonie. On y désirerait seulement rencontrer un peu d’âme, de vraie tristesse, et quelques pensées. En somme, les poésies de M. Joseph Bard ne sont pas absolument sans mérite ; mais, bien qu’il ait fait les Mélancoliques, dans sa préface, il s’écrie : « Je suis catholique, c’est là mon plus beau titre », et nous sommes tentés d’être de son avis.

Encore une traduction nouvelle des Satires et des Épîtres d’Horace, par M. Ragon[1]. Celle-ci peut aller de pair avec toutes les traductions d’Horace qui l’ont précédée. Elle n’est ni meilleure, ni plus mauvaise. Voilà vraiment tout ce qu’on en peut dire. Je me trompe. Il y faut blâmer sévèrement l’emploi des vers libres. Expulsés qu’ils sont maintenant de notre poésie, leur usage est surtout inopportun et impardonnable dans une lutte entreprise contre les hexamètres latins.

La première livraison d’une traduction des œuvres complètes de Ludwig Tieck vient d’être aussi publiée[2] et contient Shakespeare et ses contemporains avec le prologue. Nous n’avions en français qu’une imitation ou plutôt un travestissement de ce délicieux ouvrage dans lequel l’écrivain allemand a si merveilleusement fait revivre le grand poète anglais avec toute son âme et tout son génie. Cette traduction nouvelle se distingue au moins par une grande exactitude, sinon par l’élégance parfaite de l’Hoffmann de M. Loève-Veimars. Quoi qu’il en soit, un succès réel est promis à cette publication dont nous attendons impatiemment la seconde livraison.

Ne terminons pas cette chronique déjà cependant bien longue, sans y enregistrer une nouvelle qui intéresse vivement tous les amis de la vraie poésie. M. de Lamartine, qui vient

  1. Chez Maire-Nyon.
  2. Chez Vimont, passage Véro-Dodat.