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connétable de Bourbon. Le troisième et le quatrième sont uniquement consacrés à la passion de François Ier pour Françoise de Foix. Le cinquième acte se passe sous les murs de Pavie. Chacune de ces trois actions n’est guère liée aux deux autres que par un rapport de succession, par un accident de temps. Mais vraiment, on ne pourrait pas dire que la seconde se déduise de la première, ou la troisième de la seconde. Une femme vieille et passablement laide fait des avances au connétable, et le rappelle du gouvernement d’Italie pour se donner à lui. Sur son refus, auquel avec un peu de raison elle aurait dû s’attendre, après avoir vainement essayé de le séduire à sa personne par d’ambitieuses et criminelles espérances, quand elle s’est convaincue, à sa honte, que le duc de Bourbon ne voudrait pas même d’un trône à ce prix ; que la plus riche couronne ne réussirait pas à déguiser sa laideur et sa vieillesse, elle n’écoute plus que sa colère et sa vanité humiliées ; elle le dépouille de ses commandemens, et de la meilleure partie de ses richesses. Le connétable, poussé à bout, passe à Charles-Quint, et va combattre l’armée française à la tête des impériaux. Sans nul doute, il y a là toute l’étoffe d’une action vivante et animée. En attribuant, avec la partialité que l’art peut toujours se permettre, le premier rôle politique à la duchesse d’Angoulême ; en rejetant dans l’ombre la figure du roi ; en groupant autour de ces deux caractères entre lesquels la lutte est engagée, quelques ambitions subalternes toujours empressées au service des passions royales, si viles qu’elles puissent être ; en donnant pour champ clos à ce duel la France du seizième siècle ; en suivant toutes les chances du combat, jusqu’au moment où le vainqueur oblige le vaincu à lâcher pied, pour revenir bientôt plus ardent et plus fort, et pour venger enfin son outrage sur la liberté de son roi, je m’assure que le génie dramatique n’aurait rien à regretter, et n’appellerait à son secours aucune richesse étrangère au sujet. Les épisodes naîtraient d’eux-mêmes. La cour et le peuple se placeraient naturellement sur le second plan. Puis à l’horizon, on découvrirait Charles-Quint et Luther, Henri viii et le cardinal Wolsey.