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VOYAGE DE DÉCOUVERTES.

les ordres du Humbé. Celui-ci vint même à la tête de son armée, pour encourager de sa présence ses partisans. Quoiqu’il fût bien supérieur en nombre aux révoltés, il fut défait et forcé de demander la paix. Les vainqueurs, qui se préparaient à le poursuivre et à le chasser de ses états, lui dictèrent les conditions.

Le Bihé comprenait les provinces septentrionales du royaume du Humbé ; elles n’égalaient ni par leur étendue ni par leur population celles qui étaient restées fidèles à leur souverain. Ainsi c’était par leur courage que les habitans avaient réussi à conquérir leur liberté. Ils se choisirent un chef qui, dès ce moment, fut indépendant et ne reconnut plus de supérieur ; leur pays forma un état qui prit le nom de Bihé, d’après celui du territoire principal. Le succès de cette entreprise excita chez ce peuple le désir des conquêtes, et avant de mettre bas les armes, il voulut s’agrandir. Un différend entre deux petits cantons limitrophes, qui se déclarèrent la guerre, lui donna l’occasion de les conquérir l’un après l’autre. Mais les Bihens, loin de réduire en esclavage les peuples qu’ils soumettaient, leur conservèrent leur liberté et les incorporèrent à la nation. Cette nouvelle manière de traiter les vaincus fit de nombreux amis aux Bihens. Plusieurs petits pays voisins ambitionnèrent l’honneur d’appartenir à ce nouvel état, qui devint puissant et fut universellement redouté et respecté.

Pendant quelques années, les Bihens eurent à soutenir des guerres continuelles ; cependant les hostilités eurent leur terme, et on ne prit plus les armes que pour aller à la chasse. Toutefois de temps à autre les Bihens montrent qu’ils n’ont pas oublié que leur puissance leur permet de se mesurer avec leurs ennemis ; d’ailleurs le désir de se procurer des étoffes et du tafia les excite à attaquer des pays très éloignés, pour y faire des esclaves. Aujourd’hui ils ne cherchent plus à agrandir leur territoire, puisque cela ne les rendrait pas plus formidables. La seule nouvelle de l’approche de leurs armées met en fuite les peuples les plus courageux et les plus forts qui se cachent dans les forêts.

La conversation de ces nègres me fit naître l’envie de passer