Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 5.djvu/347

Cette page a été validée par deux contributeurs.
333
EXCURSIONS DANS LE VENEZUELA.

sont, comme on sait, d’excellens nageurs. Ils plongeaient dessous les tortues pendant qu’elles se chauffaient au soleil, les retournaient et les retenaient jusqu’à ce qu’un canot vînt à eux. »

D’Acapulco il redescendit à Valparaiso, qui fut ravagé, quelques mois après son arrivée, par un affreux tremblement de terre.

« L’archipel de Chiloë même en ressentit la commotion ; c’était le plus fort qu’on eût éprouvé dans le pays, de mémoire d’homme. Le jour avait été lourd et calme, et comme on le remarqua plus tard, la mer avait été houleuse dans le port sans aucune apparence de vent au dehors. La première secousse arriva à dix heures et demie du soir. Elle ne fut heureusement pas très forte, de sorte que les habitans avertis purent sortir de leurs maisons. Une autre secousse succéda à la première après un court intervalle, et fut si violente, qu’en quelques secondes toutes les églises de Valparaiso ne furent plus qu’un monceau de ruines. Le palais du gouverneur et presque toutes les habitations furent détruites ; celles qui restaient debout, étaient lésardées en tous sens. Le ruido qui accompagnait ce tremblement de terre était effrayant ; il ressemblait à des éclats de tonnerre souterreins. Le craquement des églises et des maisons qui s’écroulaient, les cris des habitans, les hurlemens des chiens, dont les rues étaient pleines, formaient un concert terrible que nous, en mer, où nous courions peu de danger, ne pouvions entendre sans frémir. Tous les soldats de marine débarquèrent aussitôt pour protéger la douane et les marchandises éparses des négocians. Nous pûmes contempler alors les horreurs qui avaient accompagné le tremblement de terre. Beaucoup de personnes avaient été tuées dans leur lit ; d’autres, échappées dans les rues, avaient été écrasées sous des pans de murs. C’était une horrible confusion ; toute place un peu vaste était remplie de fugitifs, frappés de terreur et à moitié nus, car on n’avait pas songé à se vêtir. En même temps des bandes de rotozos couraient dans les rues et profitaient de cette occasion pour voler dans les maisons. — Lorsque le premier danger fut passé, quoique d’autres secousses se fissent encore sentir, les habitans se retirèrent sur les montagnes environnantes, où, rassemblés autour des prêtres,