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EXCURSIONS DANS LE VENEZUELA.

et elles y gagnent une fraîcheur de teint qu’on trouve rarement dans le pays. L’habillement des Bogoteñas se compose de la saya, de la mantilla et du sombrero. La saya recouvre les habits qu’on porte dans la maison ; elle est en casimir noir, avec trois larges franges de dentelle noire et des petits glands de soie ; elle est si collante sur le corps, qu’elle en dessine toutes les formes, et qu’elle empêche de faire de grands pas. Quand une femme a un ruisseau à traverser dans la rue, elle est littéralement obligée de le franchir à pieds joints. La mantilla pend du haut de la tête, et recouvre le cou et les épaules ; le sombrero est un chapeau de feutre noir, de forme très basse. »

Notre voyageur quitta Bogota pour rejoindre les armées rassemblées dans les différentes parties de Venezuela.

« Après avoir passé Neyva, il faut descendre de cheval, car le sentier est si étroit, qu’il n’y a pas de place pour les genoux du cavalier, et comme il y fait très glissant, on serait sûr de se briser les os au moindre faux-pas de l’animal. Le feuillage des arbres qui couvrent ce chemin est si épais, qu’on marche presque dans l’obscurité ; si l’on rencontre des bœufs ou des mulets chargés, on est obligé de grimper sur les côtés, en se tenant à des plantes ou à des racines, jusqu’à ce que les animaux aient passé » Des Indiens nommés charquis portent les fardeaux et les voyageurs dans ces passages dangereux. Lorsque c’est un homme, ils le font placer dans un fauteuil attaché à leurs épaules. Le voyageur s’y asseoit à son aise, et de manière à éviter toute espèce de mouvement, qui pourrait ébranler le porteur, et lui faire perdre l’équilibre ; aussi les charquis se font-ils toujours payer plus pour porter un homme que pour un fardeau, alléguant avec raison qu’ils courent plus de danger avec ce qui remue qu’avec ce qui est immobile. Ils ont soin aussi de temps en temps de l’engager à ne pas changer de position, souvent même ils insistent pour qu’il se bande les yeux dans les passes dangereuses. Ils se font payer double pour transporter une femme. Leur dos est toujours déchiré comme celui des bêtes de somme. Ils sont très sobres dans ces voyages, et malgré leur passion pour les