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VOYAGE DANS LA TARTARIE, ETC.

peut-être pas en pareille occasion ses dominateurs actuels.

Après avoir fait une ample moisson de livres, d’images saintes, de connaissances théologiques et de souvenirs religieux, le chef du pélerinage, resté seul de tous ceux qui l’avaient entrepris avec lui, songea à retourner dans son pays, dont il était éloigné depuis douze années. Il s’embarqua pour Java, et fut assailli par une violente tempête. Son inquiétude était moins pour lui-même que pour la précieuse pacotille qu’il rapportait à ses compatriotes, et qu’il tremblait de voir à chaque instant ensevelir au fond de l’Océan. Une seconde tempête l’attendait encore dans sa traversée de Java à la Chine, et celle-là fut si terrible, que les pilotes inexpérimentés qui le guidaient, croyant débarquer à Canton, se trouvèrent, au bout de soixante-dix jours, portés à trois cents lieues plus loin dans la partie septentrionale de la Chine. Toutefois, il débarqua heureusement avec les richesses qui lui avaient coûté tant de peines, et consacra le reste de sa vie à traduire en chinois les livres indiens qu’il avait rapportés. Il avait parcouru par terre environ douze cents lieues, fait une navigation de plus de deux mille, et visité trente royaumes différents.

Les idées que ce voyageur nous donne des états qu’il a visités sont autant d’acquisitions nouvelles pour la géographie orientale. Plusieurs pays n’étaient connus que de nom ; d’autres étaient complètement ignorés. On ne savait rien de la position relative de la plupart, et comme les Indiens n’ont pas plus de livres historiques que de traités de géographie ancienne, il faut que ce soit un voyageur chinois qui nous apprenne où étaient situés les lieux auxquels s’attache chez eux-mêmes la plus grande célébrité religieuse. C’est ce qui donne le plus d’intérêt à la relation dont je viens de présenter une rapide analyse, et à d’autres plus étendues, mais plus modernes, que j’ai découvertes récemment, et que je me propose de communiquer à l’Académie. À la vérité, ces voyageurs pélerins, tout entiers à leur objet religieux, étendent rarement leurs observations aux points qui nous paraîtraient les plus importans. Ce ne sont pas les affaires humaines, mais les choses du ciel qui fixent leur attention. Ils ne parlent