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VOYAGES.

sont retirés avec un groupe de naturels sur Nioukou-Lafa

Le vent a continué à souffler avec beaucoup de force à l’est-sud-est, accompagné de violentes rafales et d’une pluie continuelle. Le mauvais temps nous a empêchés de recommencer la canonnade.

À trois heures après-midi, une petite pirogue, conduite par Martineng, a débordé de la plage vis-à-vis de Mafanga ; comme ce marin ne pouvait seul gouverner l’embarcation, un naturel lui a donné la main jusqu’à une certaine distance de terre ; puis il s’est jeté à la nage et a laissé Martineng seul venir à bord.

Ce matelot a déclaré qu’il était envoyé au nom de Tahofa pour m’annoncer que tous les hommes de l’Astrolabe allaient m’être renvoyés incessamment, pourvu que je promisse de ne plus tirer sur Mafanga. Martineng nous dit que cette décision n’avait été prise que la nuit dernière, après de longues et fréquentes conférences entre les chefs, où les prisonniers avaient été successivement amenés et interrogés. — Du reste, les naturels ne leur avaient fait aucun mal. Les meilleurs guerriers de l’île, au nombre de trois mille, se trouvaient en ce moment rassemblés à Mafanga, avec d’immenses provisions de flèches, de lances, de casse-têtes et même de fusils. — Les naturels avaient creusé une quantité de fossés et de chausse-trapes tout au travers de la place, et avaient abattu une foule de cocotiers, de bananiers et d’arbres, pour former des barricades sur divers points de Mafanga. — Il paraît que notre artillerie aurait fait peu de mal aux naturels, et Martineng n’a eu connaissance que d’un seul homme tué avant-hier par le coup de canon de retraite, tiré à mitraille.

Comme Martineng était un des hommes dont les intentions m’étaient le plus suspectes, je ne voulus point le laisser communiquer avec le reste de l’équipage, dans la crainte que ses rapports ne produisissent un mauvais effet sur l’esprit de ses camarades. Je ne lui donnai que le temps de prendre un verre de vin et une poignée de tabac, puis je le fis recon-