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RÉVOLUTIONS DU BRÉSIL.

n’était point un tyran. L’histoire donnera des éloges à la modération dont il fit preuve dans cette circonstance ; elle en donnera aux sentimens généreux qu’il déploya la nuit du 7 avril, où il renonça à la couronne ; mais elle redira qu’en faisant quelques concessions, il pouvait encore conserver le pouvoir, et le blâmera d’avoir, par une abdication qu’on n’exigeait point de lui, livré à toutes les chances des révolutions l’empire dont il avait été le glorieux fondateur.

Don Pedro a traversé les mers. Empereur, il y a deux jours, aujourd’hui simple particulier, nous l’avons vu à côté d’un monarque qui, il y a deux jours, n’était aussi qu’un père de famille et un citoyen riche. On s’est accoutumé au bruit des trônes qui s’écroulent, et à peine si l’on détourne la tête pour considérer leurs débris.

Sur don Pedro cependant se fondent encore de nobles espérances. Peut-être est-il appelé à porter le poids d’une nouvelle couronne. Les mêmes fautes, il ne les commettra plus sans doute ; aujourd’hui il doit connaître les hommes. Fortifié par les leçons de l’expérience et de l’infortune, il saura suivre une marche assurée, la seule qui, dans la conduite des peuples, puisse leur inspirer quelque confiance ; il saura distinguer les gens de bien, et surtout il repoussera loin de lui ces camarillas ignobles, qui trop souvent ont terni la gloire des rois de la Péninsule, et causé le malheur de leurs peuples.

Quant au Brésil, ses destinées reposent aujourd’hui sur la tête d’un enfant. C’est un enfant qui unit encore les provinces de ce vaste empire ; et son existence seule oppose une barrière aux ambitieux qui surgissent de toutes parts avec une égale médiocrité et des prétentions également gigantesques[1]. Un Européen ne peut régner sur l’Amérique ; mais celui-là est Brésilien : le brillant azur du ciel des tropiques a frappé ses premiers regards ; c’est sous l’ombre des bois vierges

  1. Cet aveu est fait par les Brésiliens eux-mêmes. V. Aur. Flum. no 482.