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LITTÉRATURE.

républicanisme si pur que celle du jeune général, qu’un soupçon n’eût pas osé atteindre sa mère ni ses sœurs. Voilà pourquoi l’une d’elles, jeune fille de seize ans, comme étrangère à tout ce qui se passait autour d’elle, aimait et était aimée, et la mère de Marceau, craintive comme une mère, voyant un second protecteur dans un époux, pressait, autant qu’elle le pouvait, un mariage qui était sur le point de s’accomplir, lorsque Marceau et la jeune Vendéenne arrivèrent à Nantes. Ce retour en ce moment fut une double joie.

Blanche fut remise aux deux jeunes filles qui devinrent ses amies en l’embrassant, car il y a un âge où chaque jeune fille croit trouver une amie éternelle dans l’amie qu’elle connaît depuis une heure. Elles sortirent ensemble ; une chose presqu’aussi importante qu’un mariage les occupait : une toilette de femme ; Blanche ne devait pas conserver plus long-temps ses habits d’homme.

Bientôt elles la ramenèrent parée de leur double toilette, il avait fallu qu’elle mît la robe de l’une et le schall de l’autre.

— Folles jeunes filles ! il est vrai qu’elles n’avaient à elles trois que l’âge de la mère de Marceau, qui était encore belle.

Lorsque Blanche rentra, le jeune général fit quelques pas au-devant d’elle, et s’arrêta étonné. Sous son premier costume, il avait à peine remarqué sa beauté céleste, et les grâces qu’elle avait reprises avec ses habits de femme. Elle avait tout fait, il est vrai, pour paraître jolie, un instant elle avait oublié devant une glace, guerre, Vendée et carnage : c’est que l’âme la plus naïve a sa coquetterie lorsqu’elle commence à aimer, et qu’elle veut plaire à celui qu’elle aime.

Marceau voulut parler et ne put prononcer une parole ; Blanche sourit et lui tendit la main, toute joyeuse, car elle vit qu’elle lui avait paru aussi belle qu’elle désirait le paraître.

Le soir, le jeune fiancé de la sœur de Marceau vint, et comme tout amour est égoïste, depuis l’amour-propre jus-