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VOYAGES.

ses amis. Quelqu’un d’entre eux, ou le rabat lui-même, s’adresse au haramy, et lui dit : « Neffa, c’est-à-dire renonce. » La peur des coups oblige le haramy de dire : « Beneffa ; je renonce. » Cette cérémonie est fondée sur une extension des lois de l’hospitalité, qu’il est nécessaire d’expliquer ici.

Lorsqu’un Arabe est sous le coup d’un adversaire, s’il peut toucher un troisième individu, quel qu’il soit, fût-ce le frère de celui qui le menace ; ou s’il touche un objet inanimé que l’autre tient dans ses mains, ou avec lequel une partie quelconque de son corps est en contact ; ou s’il peut l’atteindre en crachant sur lui, ou en lui jetant une pierre, il n’a qu’à prononcer en même temps la formule : Ana dakhila (je suis ton protégé), ou Terany ballah wa bak ana dakhilak (tu me vois par Dieu et par ta vie ; je suis ton protégé), pour n’avoir plus rien à craindre de celui qui le menaçait, et, suivant une coutume qui a force de loi parmi les Arabes, le troisième individu est obligé de prendre sa défense, ce qui toutefois est rarement nécessaire, parce que, dès ce moment, l’agresseur se désiste de ses poursuites. Or, le haramy aurait droit au même privilége s’il pouvait saisir l’occasion de l’invoquer. C’est pourquoi les amis du rabat, en entrant dans la tente, obligent le haramy de renoncer au privilége du dakhil ou protégé, et sa réponse habituelle : Je renonce, le met dans l’impossibilité de réclamer la protection due à un dakhil dans les circonstances que j’ai indiquées. Mais cette renonciation ne vaut que pour un jour ; car si le lendemain les mêmes personnes entrent dans la tente, la même formule de renonciation devient nécessaire, et, en général, on doit la répéter toutes les fois qu’il se présente un nouveau venu.

Pour empêcher que le haramy ne s’évade ou ne se fasse un protecteur, on creuse au milieu de la tente une fosse de deux pieds de profondeur, et d’une largeur égale à la taille du captif. Après l’avoir étendu dans cette fosse, on enchaîne ses pieds à la terre, on lui lie les mains, et l’on entortille ses cheveux autour de deux piquets plantés des deux côtés de sa