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SAYNÈTE.

Le Chancelier.

Oui, seigneur, et les mêmes juges le punissant autant que le permettait le caractère dont il était revêtu, lui ont interdit pour un an ses fonctions ecclésiastiques.

Don Pèdre, déchirant l’arrêt.

Et moi, je condamne Nunez, maçon, à ne pas toucher à sa truelle d’un an…

Le Chancelier.

Y pensez-vous, seigneur, un misérable ouvrier qui a trempé ses mains dans le sang d’un prêtre !…

Don Pèdre.

De quelle couleur étaient les mains de ce prêtre qu’il a frappé ?… Le premier était un assassin… le second n’est qu’un vengeur qui exerce de légitimes représailles… Savez-vous qui a poussé cet orphelin, ce misérable ouvrier à ce que vous nommez un attentat effrayant ? C’est moi, moi, don Pèdre, roi de Portugal ; je l’ai fait venir ici à votre place, chancelier ; je lui ai donné mon propre poignard… je lui ai, dit : Venge-toi ; je lui ai appris à bien frapper, à mieux frapper que vous, juges débiles et sanguinaires… — Quel est l’autre arrêt que vous m’apportez ?

Le Chancelier.

C’est l’arrêt qui condamne au feu don Félix de Porto Carrero, parricide.

Don Pèdre, se levant.

C’est impossible.

Le Chancelier.

Le coupable aurait été convaincu s’il n’avait avoué de lui-même…

Don Pèdre.

Mais, chancelier, parricide ! ceci veut dire assassin de son propre père…

Le Chancelier.

Oui, seigneur, il a tué son père d’un coup d’épée dans les ruines du monastère de Saint-Sébastien.