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RÉVOLUTION POLONAISE.

nale, les représentans et les chefs du peuple délibéraient avec calme et sang-froid au bruit du canon.

Le 19, voyant des fenêtres la mêlée de Grochow, la diète décréta un fonds provisoire de 10 millions en faveur des familles de ceux qui succombaient sous ses yeux, et se déclara en permanence, avec la faculté de transporter le siége de ses séances en quelque pays que ce fût.

Cependant quelques membres de la haute société des doctrinaires parlaient de soumettre la Pologne à l’Autriche, soit qu’ils désespérassent de la lutte avec la Russie, soit qu’un penchant naturel aux familles riches les attirât vers cette grande distributrice de titres et de majorats. Ce n’était au fond que l’éternel projet des doctrinaires, qui a tant de fois troublé la Pologne dans les XVIe et XVIIe siècles, et qu’on croyait tout-à-fait oublié. Lelewel était difficile à tromper ; on lui dépêcha à cet effet un comte autrichien[1], qui lui fit un grand éloge d’Exner, consul d’Autriche à Varsovie ; mais Lelewel refusa constamment de le voir. — « Il s’agit maintenant, lui disait le comte, de conserver notre indépendance, même aux dépens d’une partie de nos libertés ; d’ailleurs, nous serons toujours à temps de prendre pour roi le duc de Reichstadt ou l’archiduc Charles. »

Tout à coup se répandit la nouvelle de l’entrée des troupes autrichiennes en Pologne : le gouvernement national lui-même reçut des rapports de plusieurs bourgmestres des villes frontières de la Gallicie, et le commissaire (sous-préfet) de Sandomir lui annonçait officiellement cette nouvelle. Rien n’était plus faux, et l’on ignore encore l’auteur de ces fables. Mais Gustave Malachovski, comte autrichien, et ministre des affaires étrangères de Pologne, assurait positivement le gouvernement qu’on pouvait compter sur la bienveillance et les secours de la cour de Vienne ; il déclara même plus tard que c’était une chose convenue. Pressé de fournir des preuves de ce qu’il avançait, il ne put produire qu’une lettre du prince

  1. Wonsowicz, à ce qu’on dit.