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RÉVOLUTION POLONAISE.

forces, calme devant la lutte inégale qui se préparait, et ôtant ainsi à ses ennemis jusqu’à l’espoir d’une désunion funeste

On ne tarda pas à se convaincre qu’avec toutes sa bravoure de soldat, Chlopicki était incapable du moindre sacrifice personnel pour le bien de la patrie, et l’on apprit avec indignation qu’il avait paralysé l’élan national. Les approvisionnemens de l’armée avaient été faits sans prévoyance, et les magasins établis sur la rive droite de la Vistule, comme s’ils eussent été destinés à l’ennemi. La position défensive de l’armée près de la capitale, bien loin de garantir le pays d’une invasion, ouvrait aux Russes toute la frontière orientale, et les vieilles troupes enfin étaient seules placées sur la ligne, à l’exclusion des régimens de nouvelle levée qui en avaient été repoussés. Mauvais choix dans le personnel des administrations ; mutations trop fréquentes dans les commandemens militaires ; destitution des officiers activement occupés de la formation de nouveaux régimens ; refus constant d’admettre dans les rangs de l’armée les Polonais échappés des provinces voisines ; mépris des anciens officiers, des volontaires et de l’ardeur nationale ; abandon des piques et des faux, quand il n’y avait pas d’autres armes ; dissolution de la garde de sûreté !… telles sont les fautes qu’on ne pardonnera jamais à Chlopicki. Ceux qui l’ont connu de près accusent son indolence pour le laver du reproche de trahison. Capricieux, opiniâtre, trop faible pour le pouvoir qu’il convoitait, il n’avait aucune foi dans les ressources de la nation, et ne cherchait qu’à amortir peu à peu la révolution.

Les pertes de temps étaient incalculables, et la désorganisation ne pouvait être réparée que par un redoublement d’activité. C’est là que tendirent toutes les volontés ; les mésintelligences, les dissensions firent place à l’union et à l’oubli du passé.

L’exaspération contre Chlopicki était trop grande pour ne pas inspirer des craintes pour sa sûreté personnelle. Le jour