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LITTÉRATURE.

— Nephtali, s’écria involontairement Tirtza !…

— Nephtali, répéta Zimram !

Il avait reconnu l’étranger du temple, et brandissait son poignard.

— Frappe, Zimram, s’écrie le jeune homme en découvrant sa poitrine. Frappe, mais sauve ta femme, Tirtza est innocente.

— Peuple d’Israël, écoutez-moi.

« Tirtza avait perdu ses parens, mon père l’éleva, et je l’aimais d’amour, quoique mon père m’eût promis à la fille de son frère ; il m’ordonna donc de partir, j’obéis À mon retour, Tirtza n’était plus chez mon père ; mariée, elle avait suivi son époux à Jérusalem.

« Voulant revoir mon amie d’enfance, la voir et la quitter après pour toujours, j’arrivai ici, on lui dit que dans les angoisses de la mort j’attendais la permission de la voir. Lui ferez-vous un crime d’avoir eu pitié de moi ? d’avoir caché cette entrevue à son époux ? lui qu’elle savait jaloux et soupçonneux ?… Hélas ! c’était ma sœur, je suis son frère ! un frère ne peut-il donc aimer sa sœur ? ne peut-il pas lui dire : Ma sœur, adieu !… Je lui disais : Ma sœur, adieu !… Eh bien ! Je lui disais : demain je pars, encore un moment, un regard, une parole de toi. »

Zimram, ton ennemi s’offre à tes coups, mais qu’une victime te suffise, grâce pour cet ange innocent et pur !

— Si tu aimais seul, je n’hésiterais pas à te tuer, répond Zimram, remettant froidement son poignard dans sa ceinture ; mais ta mort ne me rendra-t-il son amour ? Tu as troublé son repos, tandis qu’elle… a détruit mon bonheur.

— Elle n’aime que toi, Zimram.

— Elle n’aime que moi !… Misérable, regarde-la ! Vois cette rougeur dont ta présence a coloré ses traits, vois…, ses sanglots se sont arrêtés pour t’écouter ; dis-moi, quel nom errait sur ses lèvres lorsque tu as paru ? est-ce le tien ou le mien ? Mais qu’elle jure sur notre sainte loi que c’est moi seul qu’elle aime !… Qu’elle le jure, je la croirai.