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HISTOIRE. — PHILOSOPHIE.

ridicule de royaume de Pologne, le général Dombrowski, le même qui avait jadis commandé les légions polonaises en Italie, recréa la société patriotique. Le nom de tous ses membres ne nous est pas connu. La conspiration de Saint-Pétersbourg, à l’avènement de Nicolas, en dévoila quelques uns, qui furent absous par le sénat polonais. Depuis cette époque, on redoubla d’efforts pour préparer une révolution ; on encouragea la jeunesse à former de petites sociétés patriotiques, et elles se multiplièrent beaucoup à Varsovie. En 1829, les jeunes conspirateurs voulaient massacrer toute la famille impériale pendant que Nicolas jouait à Varsovie la comédie du couronnement. Mais la seule idée que pendant dix siècles la Pologne avait eu de bons et de mauvais rois, et que pas un n’avait péri des mains de ses sujets, retint leurs bras. La guerre de Turquie présentait encore quelque chance de succès : tout était prêt pour une insurrection à Varsovie ; mais Niemcewicz ne trouvant pas cette époque assez favorable, on remit l’exécution d’un si grand projet à un temps meilleur.

Les Russes n’ignoraient pas qu’il existait à Varsovie une société secrète, qui dirigeait l’esprit de la jeunesse. On a trouvé dans les papiers de la police les rapports que faisait tous les jours au grand-duc un des chefs d’espions, Szlej : on s’étonna même de l’exactitude des renseignemens qu’ils contenaient. Les papiers d’un autre chef de la police secrète, le colonel russe Sass, prouvent aussi qu’il prévoyait le danger sans le croire si imminent ; il blâmait d’ailleurs la conduite de Constantin, et neutralisait l’influence d’agens perdus de vices et chargés de crimes dans lesquels il avait mis sa confiance[1].

  1. Constantin s’efforçait d’attirer les Polonais dans les intérêts de la Russie, de les armer contre leurs propres compatriotes, d’en faire des espions. Tel fut Lubowidzki, dont il sera parlé plus bas. Pauvre et chargé d’une nombreuse famille, il attira sur lui les vues de Constantin, mais il repoussa ses premières propositions avec fermeté. Bientôt le Czaréwitch semble avoir tout oublié, et Lubowidzki jouir de sa faveur.