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MORT DU CALIGULA.

quirites, finissons ces jeux aussi heureusement qu’ils ont commencé. Suivez-moi, mes familiers ; prenons place. Si les acteurs s’acquittent de leurs rôles comme les jours précédens, ils se loueront de ma munificence. Mais quelle tragédie donnent-ils ?Cynire, je crois ? (À Chereas.) Par mon génie, tu as fait une lourde sottise, Chereas, en donnant la question, et si cruellement encore, à cette belle Quintilia, qui eût prêté au personnage de Myrrha le charme de sa pantomime et le pathétique de sa voix. Voilà des exploits de ce fier guerrier ; c’est contre des femmes qu’il faut l’expédier… Tu ne dis rien, Chereas ? N’en parlons plus. Je jette ces paroles en riant.

Chereas, bas à Asiaticus, en levant les yeux au ciel. Courage, Ô Caïus ! aiguise bien ce glaive.

Caïus, à Minucianus. Ah ! il est ceint de son glaive, le tribun prétorien : c’est donc lui qui viendra aujourd’hui demander la tessère ? J’ai un bon mot d’ordre à lui donner.

Minucianus, d’un air indifférent. Il est vrai, César ; c’est son tour aujourd’hui.

Sabinus, bas à Chereas. Je tremble que cette remarque ne le mette sur ses gardes.

Chereas, bas. Non ; il ne paraît déjà plus y songer.

Caïus, au consul Pomponius Secundus, en s’appuyant sur son épaule. Il me vient vme plaisante idée. Si je n’avais pas absous cette Quintilia, ainsi que son amant Popedius, j’ordonnerais qu’elle vînt jouer le rôle de Myrrha dans l’état où elle est. Cela ferait enrager ce maladroit de Chereas, de voir la fille de Cinyre toute disloquée par son fait.

Pomponius. Voilà de ces idées réjouissantes pour lesquelles ton génie est sans rival, ô César !

Caïus, regardant le public. J’aime ces petites saturnales de nos jeux augustaux : n’est-il pas amusant de voir se presser pêle-mêle cette cohue d’hommes, de femmes, de maîtres, d’esclaves, de sénateurs, chevaliers et plébéiens ?

Annius Minucianus, bas à Valerius, proconsul, et à Paullus Arruntius. Ne remarquez-vous pas qu’aujourd’hui César n’a rien de rude et de farouche ?