Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 3.djvu/163

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Une Vision.


Comme un ange ici-bas elle m’est apparue,
Tel un songe charmant qu’on ne fait qu’une fois ;
À son premier regard mon âme est accourue,
Et je tremblai sitôt que j’entendis sa voix.

Elle était pure et belle, et sa touchante image
S’entourait de rayons qui reposaient les yeux ;
Son front était pensif et voilé d’un nuage,
On eût dit à la voir qu’elle pleurait les cieux.

Une fois à mes chants elle a daigné sourire,
Mais ce fut un éclair qui s’éteignit soudain ;
Alors il me parut que ma voix et ma lyre
Devaient se taire ayant accompli leur destin.

Retrouverai-je un jour cette jeune mortelle,
Reverrai-je jamais l’étoile de son front ?
Sur un nuage d’or peut-être viendra-t-elle,
Ou que du lac d’argent les flots l’amèneront !

Et tous les soirs je viens à l’heure du silence
Chercher un vague espoir sur les rochers déserts ;
Écouter si des eaux quelque bruit ne s’élance,
Et regarder les flots et consulter les airs.