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LITTÉRATURE.

ai dit que notre entreprise aurait en toi un homme de cœur pour soutien.

(Il sort.)
D. Louis, seul.

Et cependant elle va mourir !… Je suis un misérable, un assassin… qu’importe ? je vais mourir moi-même, je ne verrai pas son désespoir, ses larmes ; ah ! cette idée pourtant est affreuse : la mort me paraît impuissante elle-même pour en éteindre le sentiment.

(Une petite porte s’ouvre ; entre dona Isabelle, pâle et abattue ; elle s’arrête, regarde D. Louis, et lui dit d’une voix étouffée) :

Rends-moi mon honneur !…

D. Louis, pétrifié.

Vous ici, dona Isabelle !…

Dona Isabelle.

Rends-moi mon honneur !… Que t’avais-je fait, don Louis ?

D. Louis.

J’ignorais…

Dona Isabelle.

Eh bien ! alors répare le mal que tu m’as fait. Crois-tu encore à la calomnie que tu as dite ?…

D. Louis.

Oh ! jamais : votre présence suffit pour anéantir ce soupçon ; mais je ne puis publiquement…

Dona Isabelle.

Tu ne peux ! Eh bien ! sais-tu ce qui a donné lieu à ce soupçon ? Il y a quelques jours, un jeune homme s’arrêta à Jaén, petite ville d’Andalousie ; il suivit dans la nuit la camériste d’une noble demoiselle de cette ville ; il entra chez cette jeune fille, séduite par ses discours, et n’en sortit qu’au milieu de la nuit. On le vit fuir, et on accusa la maîtresse de cette suivante. On le crut généralement ; c’était une calomnie. Ce jeune homme, don Louis, c’était toi : Vittoria, ma suivante, déchirée de remords, vient de l’avouer toute