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FORMULE GÉNÉRALE DE L’HISTOIRE.

gnaient, de rendre quelques parcelles d’autorité, ou seulement d’influence politique, à ce catholicisme qui jadis avait créé et constitué l’Europe, dont l’autorité temporelle n’avait été long-temps que le ministre ;

Mais les croyances qui, grâce à la disposition des esprits, devenue sérieuse, recevaient partout un accueil plein de respect, trouvaient constamment de triples barrières au-devant de leurs pas, aussitôt qu’elles tentaient de pénétrer dans la vie politique ; et, du milieu des masses, des multitudes de voix leur criaient déjà ce que vient de leur répéter naguère l’éclatante voix d’un prêtre : « Votre royaume n’est plus de ce monde. »

Même dissentiment dans la littérature. Un petit nombre, exclusif dans son admiration pour les belles et pures formes littéraires du siècle de Louis xiv, lui avait voué un culte de fidèle imitation : mais d’autres, en s’égarant souvent, cherchaient des formes nouvelles, et en cela ils étaient les organes d’un besoin général ; car il faut que la pensée, qui, se réalisant dans le monde, fait l’histoire d’une époque, finisse par s’écrire, et elle en devient la littérature. C’est pour cela que la littérature d’une époque en demeure pour la postérité l’image, l’expression fidèle ; mais c’est aussi pour cela que les formes littéraires, le langage même d’une époque, ne réfléchissent, n’expriment fidèlement qu’elle seule. Ne voyons-nous pas Racine lui-même s’éloigner de plus en plus de nous, devenir le contemporain de Virgile ? Ne nous faut-il pas apprendre aussi en quelque sorte son harmonieux et admirable langage ? Bossuet s’adresse-t-il toujours à nos sympathies actuelles ? Et n’est-il pas arrivé à la toute gracieuse madame de Sévigné de nous révolter étrangement ?