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FORMULE GÉNÉRALE DE L’HISTOIRE.

contraires ; et ainsi, me disais-je, quelques hommes d’élite, mus seulement par un sentiment généreux, par une conviction profonde qui fait leur destinée, marchent noblement dans la vie, peu soucieux du vent ou de la vague qui pousse ou soulève la multitude. »

J’éprouve quelque plaisir à relire ce passage, aujourd’hui que dans une disposition d’esprit toute différente, et me proposant d’essayer une courte analyse des idées de M. Ballanche, je vais me trouver quelques instans sur le sillage éclatant de l’un de ces hommes dont alors même le souvenir ne m’avait pas quitté.

La méthode la plus rationnelle de rendre compte d’un système quelconque, consiste sans doute à en exposer d’abord la pensée principale, dominante, à descendre de là dans les détails, à suivre cette pensée dans ses rayonnemens ; mais il faut pour cela que le système ait dit bien décidément son dernier mot, et cela ne peut être d’un auteur vivant, surtout lorsqu’il s’occupe d’études historiques. La muse de l’histoire est inépuisable en enseignemens. De nouvelles terres sociales se montrent à nous dans l’avenir, vers lesquelles ceux qui marchent à la tête des peuples ont mission de les conduire ; en même temps des mondes nouveaux semblent sortir çà et là de la nuit des âges, et apparaissent aux yeux des Schelling, des Muller et des Hegel. Serait-ce parce qu’en raison de l’enchaînement merveilleux que la Providence a établi dans les choses de ce monde, l’histoire contemporaine contient tout à la fois les siècles qui ne sont plus, et ceux qui ne sont pas encore ? que, dans nos labeurs de tous les jours, nous travaillons non-seulement pour le moment qui s’écoule, mais que nous fondons l’avenir, que nous refaisons en quelque sorte