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VOYAGES.

de riz, dont on découvrait des plaines à perte de vue.

En attendant le signal de revenir à bord, je fis encore quelques herborisations dans la partie ouest de Manille, à peu de distance de cette ville. Dans les parages que je parcourus, je vis des plaines entières couvertes d’arbres fruitiers, et des cultures extrêmement soignées et fort bien tenues. Je n’avais pas encore vu dans la colonie des plantations régulières aussi bien établies. Les jardins, qui sont immenses et en grand nombre, sont tirés au cordeau. Tout y est planté symétriquement et avec un ordre admirable. Ils sont généralement cultivés par des Chinois qui excellent dans la culture des légumes les plus délicats. Ils en apportent tous les matins en ville, et en tirent un prix très-avantageux. L’industrie des Chinois est poussée dans cette branche d’agriculture au dernier point de perfection. Il n’y a, pour ainsi dire, qu’eux à Manille qui fournissent les marchés de jardinage ; aussi s’enrichissent-ils promptement. Il y en a qui, par cette seule branche de culture, ont acquis des fortunes colossales. Cela est d’autant plus facile, que la colonie est extrêmement peuplée, et que l’argent y est tellement répandu, que dans les plus faibles opérations commerciales, on ne parle que de piastres. Ce pays offre d’immenses ressources à l’Européen industrieux.

L’opulence de Manille s’annonce dès l’entrée de la rivière qui traverse cette vieille capitale de l’archipel de l’Asie. L’activité et le mouvement continuel des embarcations passant d’une rive à l’autre, la quantité innombrable de bâtimens de commerce qui sont mouillés dans la rade, tout respire grandeur et richesse. La superbe rivière qui coule au milieu de la ville la divise en deux parties, dont l’une est appelée la ville de