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LE BRÉSIL.

renseignemens les plus précieux sur les indigènes et sur les divisions politiques du territoire qu’ils occupaient.

Mais ces diverses relations ne décrivaient que le littoral ; les magnificences de l’intérieur restaient complètement inconnues, et cependant des hommes hardis commençaient à remonter les fleuves, à visiter les solitudes imposantes du désert. Vers la fin du xvie siècle, les Paulistes (on désignait ainsi les habitans de la capitainerie de Saint-Paul) formaient ce qu’on appelait alors des bandeiras, et renouvelaient, dans ces aventureuses expéditions, tout ce que l’esprit chevaleresque de l’époque pouvait imaginer de plus audacieux. Malheureusement ces hommes entreprenans, gens d’action, et non de savoir, ne confiaient guère au papier la relation de leurs merveilleuses expéditions ; ils ne leur attribuaient pas tant d’importance, et se contentaient, à leur retour sur le bord de la mer, d’en faire quelques-uns de ces récits que la mémoire du peuple a conservés en leur imprimant ce caractère de merveilleux que les traditions prennent toujours avec le temps.

Tantôt le voyageur était arrivé dans d’imposantes solitudes, nouvel Eldorado, où l’or et les pierres précieuses étincelaient de toutes parts ; mais la fatigue l’avait empêché de s’arrêter au milieu de ces trésors, et depuis il n’avait pu trouver ce lieu mystérieux, à la recherche duquel s’élançaient une foule d’aventuriers. Tantôt, sur le bord d’un ruisseau, la mère des eaux (mai das aguas) avait arrêté le voyageur épouvanté, et celui qui ne craignait point de combattre le jaguar entourait d’une crainte superstitieuse le lac qui renfermait le paisible manati, ce pexe boy des Espagnols, qui, dans toute autre contrée, eût pu donner naissance à la fable des Syrènes ; puis venait encore le