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VOYAGES.

personnes les plus riches, compte-t-on peu de mariages légaux, et encore ceux-ci sont-ils le résultat de l’intérêt ou du calcul, qui tend à raccommoder deux familles brouillées, ou à réunir leurs fortunes. Les moines ne se donnent pas même la peine de cacher leurs déréglemens ; beaucoup ont des enfans naturels qu’ils élèvent dans leurs couvens sans que personne s’avise d’en gloser. Les visages les plus pudiques, chez les femmes, ne sont pas le signe le plus infaillible de la sagesse ; revêtues du saya et de la mantille, et ne laissant entrevoir de leur visage que l’angle de l’œil, elles peuvent faire impunément, sous ce domino, ce qui leur plaît.

Les femmes du peuple ne donnent aucun frein à leurs passions ; on les voit se baigner parmi les hommes, les agacer par les gestes les moins équivoques, et prouver par toutes leurs actions que la pudeur est une vertu qui n’a pas doublé le cap Horn. Chez elles, ce déréglement n’a rien qui puisse étonner : le sang africain, mélangé au sang américain et au sang européen qui coulent dans leurs veines, ne rend que très-naturelles les ardentes passions qui les animent. Les femmes d’une fortune élevée aiment la toilette et le jeu : on conçoit que les plus grandes fortunes ne puissent résister à deux adversaires aussi redoutables.

Les réunions pour le plaisir de danser, ou se livrer aux charmes de la conversation sont inconnues ; celles de Lima sont entièrement consacrées au jeu, et la première éducation des demoiselles, avant leur