Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 1.djvu/221

Cette page a été validée par deux contributeurs.
209
CORRESPONDANCE ET VARIÉTÉS.

Telle était leur force, qu’ils étaient capables, non-seulement d’abattre le noble cerf, mais encore de livrer combat au loup et à l’ours redoutable, et même de tenir tête au royal lion. Ces chiens, à cause de leur naturel féroce, étaient généralement renfermés ; mais malheur à l’étranger qui aurait passé devant leur chenil à la nuit close ! Si les portes en étaient restées ouvertes, il eût infailliblement péri, à moins qu’il n’eût grimpé sur quelque arbre hospitalier, ou que le fouet de leur gardien ne fût promptement venu à son secours. Ce piqueur présidait toujours à leurs repas et ce n’était que par une distribution libérale de coups de fouet qu’une espèce d’ordre pouvait être maintenue parmi ces sauvages chasseurs.

L’habitude était de chasser trois fois par semaine, quand le temps le permettait. Ces jours-là, on servait le déjeuner à la lumière des flambeaux ; celui du général consistait en un gâteau de maïs à l’indienne, et une tasse de lait. Avant que le coq n’eût salué « le retour du matin », toute la cavalcade avait souvent quitté la maison, et le renard était fréquemment dépisté avant le lever du soleil. Ceux qui ont vu Washington à cheval conviendront qu’il était le cavalier le plus accompli dans toute l’étendue du mot ; il montait à cheval comme il faisait toutes choses, avec aisance, grâce et vigueur. Quelque vicieuse que fût sa monture, ce n’était rien pour sa hardiesse et son habileté : il ne lui demandait, disait-il, qu’une seule qualité, c’était de ne pas broncher ; et il riait de l’idée qu’il pût jamais être démonté tant que l’animal resterait ferme sur ses jambes. En effet, la force musculaire de Washington lui permettait de serrer les genoux avec tant de vigueur, qu’un cheval se serait aussi aisément débarrassé de la selle que d’un tel cavalier.

Le général se servait ordinairement à la chasse d’un cheval nommé Blueskin, d’une couleur gris-de-fer tirant sur le bleu. C’était un bel et ardent animal, supportant sans peine une longue course. Will, le piqueur, plus connu dans la légende de la révolution sous le nom de Billy, en montait un