Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 4.djvu/400

Cette page a été validée par deux contributeurs.
386
LITTÉRATURE.

Mais que le vent s’apaise, ou que le feu s’éteigne ;
Qu’aux ordres du second, répétés par l’enseigne
Et par les matelots,
Des morts ou des débris son pont se débarrasse,
La Pauline bientôt se relève avec grâce
Pour se mirer aux flots.

Coquette, elle veut voir sa voilure changée,
Car elle n’ose pas se montrer négligée
Au plus petit bateau.
Ainsi la jeune fille à l’amour se révèle,
Et demande à son père une robe nouvelle
À chaque bal nouveau.

C’est que je l’aime aussi comme on aime une fille ;
C’est tout simple, j’ai vu clouer depuis sa quille
Jusqu’à son perroquet ;
Et dans le port de Brest lorsqu’elle fut lancée,
J’ai voulu, comme au front pur d’une fiancée,
Attacher un bouquet.

Oh ! si je la perdais ! alors que deviendrais-je ?
Comment la remplacer ? Et puis d’ailleurs pourrais-je
Survivre à son trépas ?
Une fois un boulet fracassa ses mâtures ;
Je pleurai ma Pauline, et j’avais deux blessures
Que je ne sentais pas.

Enfant de l’Océan, avec idolâtrie
Je l’aime et trouve en lui parens, amis, patrie ;
C’est, je crois, sans raison
Que Dieu fit cette terre à l’aspect qui repousse,
Et qui n’est bonne au plus qu’à faire de l’eau douce
Et sécher du poisson.